Je brille comme le soleil de midi.

J'étincelle comme la luciole qui joue à être une étoile.

Et pourtant mon destin fut d’éclairer et de guider comme les étoiles.

Lune, lune froide qui tombe dans les océans bleus.

Bleu comme la frange qui couvre ma destinée.

 

Je brille comme le soleil de midi.

J´étincelle comme la luciole qui joue à être une étoile.

Et pourtant mon destin fut d’éclairer et de guider comme les étoiles. 

Lune, lune froide qui tombe dans les océans bleus.

Bleu comme la frange qui couvre ma destinée.

Rouge comme le sang de tes aïeux.

Sang de mes enfants qui coule sans cesse.               

Sang qui ne fait plus revivre la victoire.                    

Sang qui coule jours après jours   

Sang versé, écoulé, coagulé, perdu.

Sang qui te hante.

 

Je suis le vent qui souffle au nord.

Je suis les champs de riz humide et frais.

Je suis les mornes imposantes et fortes.

Je suis le crie des pintades qui défend un rêve.

Je suis le palmier couronné.

Je suis les plumes de l’aigle et du colibri.

 

Je suis les grottes, les rivières, les sources

Je suis le sel et le sable.

Je suis la marée haute des côtes du sud

Bouleversant les idées.

Je suis la richesse de l’âme des vieux.

 

Mais toi, tu cries, tu te bas pour n’importe quoi.

L’arrogance de tes ignorances te soumet dans le gouffre.

Haïti, n’est pas que moi.

Moi, je t’ai tout offert.

Et toi, tu ne fais que brûler.

Tu brûles l’espoir que te donne mon terroir.

 

Tu cries, tu te bats comme un enfant.

Ton égoïsme te rend aveugle.

 

Haïti n’est pas que moi.

Haïti est surtout toi, ton frère, ta sœur et l’autre.

Que fais tu de toi-même ?

Quel sauveur attends-tu ?

Souviens-tu du jour du pacte ?

Le jour où j’ai eu a porté le vase,

Celui qui recevait le sang, de ceux

Par qui  tu m’appelles aujourd’hui Mère.

 

Souviens-toi, que j’étais là avant toi.

Et avant toi, j’en ai reçu plusieurs. 

Les Arawak, les Tainos, et même les caribes.

Mais toi, tu fus toujours ma faiblesse.

 

Qu’as-tu fais de la pierre des anciens ?

Qu’as-tu fais des montagnes verts, couverts de vie ?

Qu’as-tu fais de mes sources purifiantes,

De mes eaux qui courraient en liberté ?

Qu’as-tu fais de mes poumons, les arbres ?

 

Tu deviens mon bourreau, mon fils !

Terre de montagnes, de rivières.

Terre, refuge des flamants roses.

Terre de plantes exotiques.

Tu me détruis, mon fils !

Et tu te détruis sans le savoir.

Et dire que tu te sens fière d’être le seul maître de mes contrés.

 

Observe-moi, mon fils.

Je suis terre de multiples semences.

Le pin se tient à côté du palmier

Mais toi, que fais-tu ?

Tu brûles ton futur

J’ai toujours été le refuge de ceux

Qui cherchent la liberté.

Mais toi, tu as brisé les chaînes, 

Rien que pour emprisonner ton esprit.

Tu as perdu la capacité de croire et d’aimer.

 

Tu glisses, tu te cognes, tu te salies

Tu te courbes, tu saignes

Tu t´alimentes de ta propre haine

Tu ne te rends pas compte que

Le sang que tu verses est celui

De ton propre frère ?

Tu ne te rends pas compte que

Celle que tu pilles est ta propre mère ?

Tu ne te rends pas comptes que 

Celui que tu maudis est toi-même ?

 Car Haïti n’est que toi.

Qui que ce soit que tu sois.

 

Tu cries, tu écrases, tu brûles, tu chasses, tu hantes que les tiens, 

Les enfants de ma gloire,

Tes enfants ont peur de toi.

Vent qui devient indomptable,

Pluie qui inonde les fragiles illusions d'un lendemain incertain.

Tu cries, tu écrases, tu détruis, tu oublies

Tu méprises que les tiens, 

Les enfants de la victoire d'hier.

Tes enfants se cachent 

Ils ont peur de toi.

Tu deviens Insatiable, mon fils.

 

Ecoute mon fils,

Apprends à reconnaître les conseils du vent.

Le bleu profond de mes cieux ne te retient plus.

Tu ne veux que partir.

Tu laisses chez toi, pour mourir ailleurs.

 

Mes couleurs persistent, ses gammes chassent la douleur.

L´arbre qu´un jour fut le témoin de mes passions

N´a pas perdu sa force, ses feuilles se teintèrent de jaune

Mais sa sève coule encore, ses racines sont profondes.

 Bleu rouge, noir rouge, blanc noir et rose

Mes couleurs me donnent la vie

Vie qui ne s'échappera pas

Je danserai autour de l’arbre, celui qui fut propice à mes folies de liberté.

 

Ecoute, J’étais là avant toi

Je suis encore là, et je le serai après toi

Je suis encore là malgré la perte de ceux venus en canot avant toi.

Je les ai appelé fils, comme toi.

Je les ai soutenus et ils m’ont procuré du respect.

J’ai reçu leur sang avec douleur.

Mais toi, tu as toujours été ma faiblesse.

 

Écoute-moi bien mon fils,

Aujourd’hui est le jour 

De la réconciliation, de la catharsis

Qui vient après  la tragédie.

Cette tragédie qui te fait  oublier que tu es humain

Et que tu es mon fils comme

Ton frère, ta sœur, tes enfants et l’autre.

 

Le temps de la transformation et de la purification est présent.

Le soleil brille pour le pin, le palmier et le bananier

Et pour tout autre arbre de ce jardin qui t’a été remis.

La pluie nous bénit à tous. 

Ton frère, qui que ce soit qu’il soit, est ton frère.

 

Aujourd’hui est le jour ou comme

L’Ave Phénix tu mets à feu ton insouciance, ton égoïsme, ta méchanceté

Ta haine, ton avarice, ta rancune,

Pour déployer des ailes flamboyantes

Jusqu’au septième des cieux, en faisant des cercles pour ainsi  tomber sur terre, te replier sur toi-même et naître de tes cendres.

Mes couleurs changent et toi tu brilles.

 

Vert, bleu, jaune, rouge

Mes enfants se rejoignent,

Noir, gris, blanc

Mes enfants n’ont plus peur

Écumes des eaux souterraines

Qui lave tes plaies.

Tu manges avec moi, 

Toi, ton frère, ta sœur, tes enfants et les autres.

Tu parles encore la langue des aïeux

La langue de l’union et la langue de la force.

Tu te renouvelles et tu vois voler l’aigle sur mes cieux d’espoir.

Mes arbres fleurissent, la rosée te bénit

Et le vent du nord te rappelle des histoires

De ta victoire,

La victoire sur toi-même, mon fils bien aimé.

La victoire de ton frère, ta sœur, tes enfants, et celle de l’autre.

Car n’oublie pas que, qui que ce soit qu’il soit, Lui aussi est Haïti

 

Mes enfants me coiffent de jolies fleurs

Les enfants, de mes douleurs passés,

Partagent tous ensemble

La joie de l´union retrouvée.

La joie de se reconnaître

Gris, vert, jaunes, ils parlent tous la langue des aïeux.

Bleu rouge, ils écrivent ma nouvelle destinée.

Les flamants reviendront sous peu.

 

Alexandra Vincent est née à Port-au-Prince à l’époque où le port créait vraiment des princes et des princesses, là ou les Gingerbreads se tenaient comme des châteaux pour développer des esprits libres prêts à s’envoler vers l’autodétermination et les rêves de grandeur.

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