« L’adversaire peut à la fois avoir le tort de parler que Dieu n’est pas, et mettre dans le mille lorsqu’il découvre et dénonce les raisons basses que nous avons de croire en Dieu ».

 

F. Mauriac, La pierre d’achoppement.

« L’adversaire peut à la fois avoir le tort de parler que Dieu n’est pas, et mettre dans le mille lorsqu’il découvre et dénonce les raisons basses que nous avons de croire en Dieu ».

 

F. Mauriac, La pierre d’achoppement.

L’homme pose ou est résolu à poser partout son empreinte dans l’univers.  Sa maîtrise de son environnement, de son espace vital comme des sphères éloignées est de plus en plus manifeste avec les résultats probants de ses recherches, les résultats de sa navigation interplanétaire voire interstellaire, de ses équations autour de multiples inconnues qui hier encore constituaient pour lui un grand mystère mais dont la révélation est désormais familière à ses yeux.  Un tel acquis doit être mis à l’actif de son esprit scientifique, bref de sa rationalité dont il a pu assurer le développement sans doute au détriment de sa relation bienveillante avec ses convictions religieuses, de son attachement à un au-delà, à une puissance créatrice qu’il juge difficilement à sa portée et qu’il finit par considérer comme vaine, futile, inconséquente.

La rationalité scientifique et le processus d’hominisation de l’univers, renforçant l’intelligence humaine dans sa conviction qu’elle ne doit ses triomphes spectaculaires qu’à elle-même et non à une « main invisible », ne sont pas les seuls à faire reculer l’influence ce du divin, du sacré, du numineux.  Le désir de l’homme de ne rendre compte qu’à lui-même se veut effectif dans tous les domaines.  Rien ne doit se placer au-dessus de son intelligence et rien ne doit être comptable de sa liberté.  Il croit de moins en moins en un dieu qui l’aiderait à assumer sa destinée et qui lui en indiquerait la voie idéale.  En revanche, il est de plus en plus confiant en ses propres capacités et son rêve est que tous les hommes arrivent à s’en rendre compte, à en être imbus pour mieux s’investir dans leur tâche d’accomplissement intégral exclusivement humain.

A cette adresse, les objectifs de la sécularisation, de la laïcisation, de l’humanisation radicale gagnent du terrain alors que ceux rattachés à l’absolu du divin, du mystère, de l’ineffable en perdent de plus en plus.  Le système laïc, rationnel, positiviste est de plus en plus allergique au discours et aux propositions éthico-spirituelles.  Toutefois, pour un ensemble de raisons que nous allons bientôt évoquer, il n’y a quand même pas lieu d’évacuer l’alternative de tenir compte de l’économie du sacré, de sa confrontation socio historique avec le profane, d’aborder sinon de pénétrer sur le terrain de leurs malentendus et d’y apporter un éclairage susceptible d’avaliser, de supporter en ce ressort l’intérêt de nos interlocuteurs.

 

1. HISTORICITE ET ANCIENNETE DES MALENTENDUS

Les incompréhensions, les malentendus et les frictions dans les relations entre le profane et le sacré ne datent pas d’hier ou d’aujourd’hui.  Ils remontent à la reculée des âges, au passé le plus lointain de l’évolution des peuples. Ils tiennent même du sens et de la position du sacre par rapport à ce qui ne l’est point.   Ce qui est sacré ou ce qui l’est devenu, c’est ce qui a été choisi, mis a part, jugé d’une dimension, d’un statut de loin plus élevé, bref exceptionnel et imposé en tant que tel au commun des hommes et des femmes ordinaires, au « troupeau », « à la « masse », aux « fidèles ».  Ce qui est sacré relève toujours d’une puissance ésotérique, d’une force magique, spirituelle dont il exprime la visibilité, symbolise la présence et l’ascendant sur les choses et les êtres d’ici-bas.  Selon Sigmund Freud, dans son analyse des sociétés primitives et plus spécifiquement de leurs tabous et de leurs totems, le sacré est l’œuvre de l’individu lui-même pour se protéger contre toutes les formes d’agression et de persécution dont il pourrait faire les frais.  L’imposition du sacré est la reponse adéquate à la fragilité de sa condition, à la délicatesse de sa situation pour se protéger et éviter la mort prématurée.  On déclare un individu, un animal ou un objet sacré parce qu’on en a peur, parce qu’on en veut se soustraire aux représailles, parce qu’il nous jette dans l’incertitude, l’agitation et l’angoisse.  Pour se débarrasser de sa colère et de sa fureur, on se met à le séduire, à le vénérer, à l’aduler, à lui faire des offrandes et des sacrifices.  Tout ce qui est mystérieux, ombrageux, ésotérique est susceptible d’être considéré comme sacré, interdit, vénérable, ajouté à tout ce qui doit être craint et capable d’infliger une punition, de jeter un mauvais sort ou un châtiment à l’exemple des chefs, des prêtres, des arbres ou des animaux tutélaires.

Les peuples dits primitifs sacralisent en jetant leur dévolu sur les objets et les arbres totémiques de même que pour assurer l’harmonie, la cohésion sociale ainsi que la légitimité du pouvoir et de l’autorité, ils jettent leur anathème sur tout ce qui y contrevient.  Ainsi, non seulement des objets et des personnes sont déclarés inviolables, des conduites, des comportements, des alliances, des échanges, des traités sont interdits et condamnés à leur tour.  Les interdits touchent autant les relations entre les membres d’une même famille que les alliances avec les membres de communautés et de régions ennemies.  En Israel, les gens de Judée et de Galilée étaient opposés a ceux de Samarie et toute forme de communication entre eux était jugée repréhensible.  Jésus a brisé cet interdit, au cours de l’un de ses voyages en s’adressant au bord du puits de Jacob à une samaritaine peu recommandable et ce fut sans doute l’une des raisons pour lesquelles les chefs du Temple et les responsables de la Loi ont tant persisté, malgré les hésitations de Pilate lui-même, à le condamner à mort et à le crucifier ».  Le choix de se mettre du côté du faible, de la veuve, de l’orphelin et de l’étranger est toujours un choix chargé de risques et de mécomptes.  Dans la mythologie grecque, les figures de Sisyphe, de Prométhée et d’Hippolyte sont significatives en ce ressort.  Les désirs et les décrets des dieux supérieurs sont imprescriptibles.  Quiconque d’un rang inférieur, même s’il est de condition divine en partie ou d’’une façon moins prononcée, dès qu’il s’y  oppose ou s’en méprend, est  passible de la plus sévère condamnation.  Hippolyte a été accusé d’avoir séduit Phèdre, l’épouse de Thésée, son père; il périt dans un combat inégal, écrasé sous les rochers.  Prométhée s’est entrepris à  révéler le secret des dieux aux mortels, il a été condamné à ce qu’un aigle lui ronge le foie qui repousse à chaque fois qu’il est  sur le point d’être rongé totalement, le soumettant à une souffrance sans terme ni mesure.  Sisyphe, un dieu inferieur, un dieu prolétaire, selon l’expression de Camus, brave les dieux supérieurs dans leur orgueil en construisant un palais démesuré et en enchainant la mort.  Pour sa bravade, il est condamné à rouler sans fin un rocher vers le sommet d’une montagne.  Dès qu’il est près d’atteindre le sommet, le rocher s’échappe et retourne vers le précipice.  

Dans l’univers antique, dans l’ambiance de la mythologie païenne autant que celle de l’histoire du salut du judéo-christianisme, le sacré tient globalement de la nécessité d’assurer la cohésion et la longévité du corps social, de la respectabilité et de la vulnérabilité de ses chefs de même que de la souveraineté et de la soumission à la volonté de ses dieux ou de son Dieu qui l’ont constitué, qui le maintiennent en vie et qui le dirigent vers sa réelle et dernière destination.  L’autorité du chef émane de celle de la divinité et violer ses préceptes équivaut à la méconnaissance et au rejet des droits divins eux-mêmes.  C’est dans cette veine qu’il convient de comprendre l’adage selon lequel « toute autorité vient de Dieu ».  Ainsi, les rapports entre la communauté et l’absolu divin se définissent comme des rapports de corrélation et d’interdépendance, à travers la médiation des chefs et des ministres sacerdotaux, de nature à justifier le caractère sacré et inviolable aussi bien du pouvoir du sabre que de celui du goupillon.  Dès les origines de l’histoire juive et chrétienne de même que de celles de la civilisation gréco-romaine le decor est planté. Il s’agit d’un décor imperturbable, drapé sans conteste dans les rigueurs de l’objectivité et de l’impartialité face au verdict de la consécration ou de la condamnation.  Abel est retenu et Caïn rejeté car les présents d’Abel ont été jugés agréables aux yeux de Dieu et ceux de Caïn, indignes de la majesté divine .  Abel, malgré le meurtre perpétré par son frère contre lui, trouvera justice aux yeux de Dieu tandis que Caïn sera condamné à errer sur toute la surface de la terre.  Dans la littérature classique grecque, un scénario bien connu est à peu près semblable.  Dans la pièce de Sophocle, Antigone, consacrée à l’inimitié et la lutte fratricide entre les enfants d’Œdipe, Étéocle est du côté du pouvoir régnant de son oncle Créon, tandis que son frère Polynice s’y oppose.  Les deux meurent au cours d’un combat homérique.  Des funérailles princières sont célébrées à la gloire d’Étéocle tandis que la dépouille de Polynice est livrée aux charognards.

Le monde antique, dans l’expression de ses diverses civilisations assyro-babylonienne, égyptienne, gréco latine et judéo-chrétienne, est dominé par l’influence et la prédominance de la puissance transcendante dans la logique même de la vie courante.  Tous les éléments et tous les phénomènes de l’univers lui sont liés sinon totalement dépendants.  Les assyro-babyloniens sacrifient à Moloch le dieu à la gueule béante de lave et de feu :  les Égyptiens à Isis et à Osiris; les Chaldéens, à El; les Grecs et les Romains a leurs homologues de l’Olympe et les Hébreux, à Yahvé, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob.  On évite de soulever leur colère par les dérogations à leurs ordres et à leurs désirs; parfois sinon souvent on s’ingénie à  l’apaiser en allant jusqu’à sacrifier les meilleurs représentants de la communauté incriminée pourvu qu’on induise le moindre doute à propos de leur intégrité et de leur fidélité.  Socrate, Antigone, Iphigénie, Jean le Baptiste, Jésus, Sénèque et bien d’autres peuvent nous en dire long.  Dans le monde antique, presque partout en Occident : le sacré jouit d’un prestige sans commune mesure et il n’y a point de sacrifice trop exigeant pour lui conserver sa grandeur, son rang et sa supériorité.  

L’offensive de la modernité

L’entreprise de relativisation et de remise en cause systématique du sacré a vraiment commencé en Occident avec la fin de l’époque médiévale, celle du césaro-papisme et par conséquent avec l’éveil séculier de la Renaissance.  Sans doute le ton avait déjà été donné avec les premières grandes hérésies qui ont secoué les fondements de la chrétienté et en particulier, celles de l’arianisme négateur de la divinité de Jésus et du pélagianisme qui a refusé d’admettre que la grâce sanctifiante ait pu jouer un rôle déterminant dans la réalisation des actions exemplaires de l’homme.  Toutefois, c’est avec l’esprit séculier de la Renaissance, sa prédilection de l’influence gréco-latine par rapport à la tradition et à l’enseignement du christianisme, la Réforme protestante, l’émergence de la cosmologie et de l’astronomie, sous l’égide de Copernic, de Galilée que le processus de sécularisation allait se mettre en branle pour de bon .  Ces grandes philosophies de l’Antiquité resurgissent sous la forme réactualisée du platonisme, de l’aristotélisme, du plotinisme, du stoïcisme, du scepticisme, etc….. Martin Luther et ses disciples contestent la sacramentalité de l’Église catholique, l’infaillibilité du Magistère pontifical et de ses dogmes ainsi que le pouvoir de médiation des prêtres entre Dieu et les fidèles.  La Renaissance italienne remet en honneur les valeurs humaines telles que l’audace, le courage, la résilience, la combativité, l’héroïsme sous la plume de L. Bruni et de C. Salutati .  Pierre Bayle n’en finit pas de vanter les qualités bienveillantes des mécréants ni de tancer les actes repréhensibles des baptisés.  A la suite de Saint Augustin les chrétiens et les ecclésiastiques s’imaginaient que la raison ne pouvait bien se comporter sans le support et les lumières de la grâce divine et de la révélation.  Avec la pensée moderne, l’homme est supposé acquérir la pleine maturité de son jugement et de sa conduite sous la seule supervision de sa logique et de sa raison sans l’appui d’aucune force surnaturelle.

Les Temps modernes, pour un nombre imposant de ses penseurs et des ses grands esprits, éprouvent le désir de se libérer de leur attachement à un être suprême qu’ils considèrent comme une aliénation.  La plupart des encyclopédistes n’éprouvent aucune gêne ni aucune peine à se faire passer pour mécréants, irréligieux, voire athées tout simplement.  Pour la plupart des encyclopédistes français et des ténors allemands de la philosophie des Lumières, s’il y a un Dieu, il est tout à fait impersonnel et n’est rien d’autre que le justificatif de l’ordre du monde dans son histoire et dans son évolution : il n’y a rien de personnel et de transcendant chez lui qui puisse échapper au pouvoir de nos recherches et de nos interrogations.  Voltaire, Diderot, d’Alembert, Montesquieu se moquent du Dieu révèle.  A leur avis le pape, les prêtres et tous ceux qui proclament son actualité ne sont que des imposteurs.  Goethe, Rousseau, Spinoza, quant a eux, se font les apôtres d’une religion naturelle, d’une forme de panthéisme dont le contact lucide et pénétrant avec les éléments du cosmos (de la nature nourricière et inoffensive) libèreraient l’homme du poids de ses angoisses, de ses tentations malveillantes en le portant à suivre les élans de son cœur et à répondre aux suggestions de la bonté naturelle de son être.

Les réserves et résistances des défenseurs du sacré

L’époque de la Renaissance, les temps modernes et l’âge contemporain se sont attelés à la tâche résolue de relativisation et de démystification du sacré.  Les penseurs émérites qui se sont engagés à cette enseigne se sont toujours servis des aspirations de l’homme à la grandeur et à la majesté de ses tentatives effectives et historiques de déification en s’adjugeant un statut équivalent à celui des dieux par les exploits de leurs ancêtres ou par un destin favorable; ils s’en sont servis, disons-nous, pour dénier toute signification et toute transcendance au divin et au sacré.  

A leur école, nous l’avons vu, l’enseignement et le projet de la désacralisation sont catégoriques.  Les prétentions du sacré et de ses défenseurs à sa légitimation ne sont qu’écran de fumée lorsque cette légitimation n’est pas le fait d’hommes cherchant à assujettir et imposer leur loi à d’autres sous prétexte que leurs dieux ancestraux sont plus forts et plus conquérants que ceux de leurs souffre-douleurs, elle est le fait d’institutions, de pays, d’idéologies se drapant dans la splendeur de la divinité pour assurer leur œuvre de conquête et d’aliénation.   Du reste, au plus fort de cette interminable plaidoirie depuis des siècles, les adeptes et défenseurs du sacré, bien qu’on les considère le plus souvent comme les accusés qui doivent prouver leur innocence, n’en éprouvent pas le moins du monde le complexe de culpabilité.  D’ailleurs, ils estiment n’avoir pas plus à prouver leur foi que leurs adversaires n’ont à prouver leur incroyance.  Youri Gagarine, à son retour de son expédition dans l’espace, se réjouissait de n’y avoir point rencontré Dieu.  Comme on lui avait fait comprendre que Dieu trônait dans les cieux et que, les ayant explorés, il ne l’y a pas trouvé, il a conclu péremptoirement à son inexistence.  On ne lui a pas tenu rigueur pour cela.  Pourquoi s’en prendrait-on aux esprits « supérieurs » profondément ancrés dans l’incroyance, lesquels se réveillent un beau matin et se mettent à proclamer haut et fort : « Dieu existe, je l’ai rencontré! » .

La foi n’est pas étrange : la pure rationalité cartésienne ne comprend pas que l’homme puisse être le résultat de sa propre initiative ou encore d’une évolution exclusivement matérielle où comme par miracle le plus (l’esprit) sortirait du moins (la matière).  Les croyants ne sont pas stupides parce qu’ils mettent leur confiance en un Être absolu qu’ils placent au-dessus de tout autant que nul ne peut juger stupides les incroyants que les arguments de la foi n’arrivent pas à convaincre et qui ajournent leur adhésion jusqu’à ce que Dieu se fasse présent « en chair et en os » sous leurs yeux d’incrédules.

Profane et sacré : cohabitation difficile mais incontournable

L’incompréhension récurrente, interminable entre le profane et le sacré n’est pas d’abord le fait de sacrificateurs zélés face à des iconoclastes intraitables.  Il n’est même pas le fait de la division du monde en deux blocs actuels, l’Occident laïc et chrétien face au monde arabo-islamique résidu de la division traditionnelle du 20ème siècle d’après-guerre entre capitalistes de l’Ouest et communistes à l’est.

Pareille incompréhension est avant toutes choses le produit de positions idéologiques intransigeantes qui éprouvent toujours de la difficulté à jouer franc jeu et à se remettre en question dans le sens d’un dialogue rationnel et réceptif à la recherche d’une ambiance et d’un terrain favorables à l’acceptation mutuelle et à la cohabitation.

En effet, la science positive répugne le sacré au nom des critères de l’objectivité, de la rationalité et de la possibilité.  Hume méconnait tout simplement la différence entre le profane et le sacré autant que celle établie entre l’athée et le théiste en raison de l’ignorance crasse de ces derniers de l’origine et de la substance tout à fait naturelles des choses, des êtres et des évènements du monde.   Le philosophe et le moine bouddhiste W. Rahula soutient que l’idée des dieux et du Dieu unique lui-même est une invention du pragmatisme de l’homme pour deux raisons : pour la protection de soi (la vigilance efficace de la divinité) et la conservation de soi (le mirage de l’éternité).  Quant à A Comte, à son avis, le sens du sacré dans le catholicisme se ramène à la seule vénération des saints et, à  défaut de valeurs supérieures il juge la pratique très adéquate en matière d’enseignement pédagogique de valorisation de modèles pour la société.  Selon le célèbre logicien autrichien, L. Wittgenstein, l’invisible et son caractère sacré ne comptent pas.  Seule est valable la réalité, la logique des faits.

Le catholicisme, la religion dans son ensemble, la transcendance et le sacré méritent une meilleure considération.  D’abord, contre Hume, la logique et le fonctionnement de l’intelligence humaine ne se cantonnent pas dans un ordre tout juste naturel.  Il y a parfois sinon souvent des suggestions, des accomplissements dans ses intuitions, dans son art, sa musique, sa danse et ses poèmes qui relèvent tout simplement du sublime et qui enchanteraient n’importe quel dieu ou n’importe quel ange.  Comment est-il possible qu’un enfant prodige chante mieux qu’un rossignol alors qu’il n’a jamais appris à chanter.  L’habileté du chant n’a pas été inscrite dans son patrimoine génétique et, si jamais elle l’a été, comment a-t-il pu dépasser à un âge si tendre les voix des sopranos ou des ténors les plus expérimentés?  Contre A. Comte, le culte des saints n’est que secondaire suivant les prescriptions du Magistère pour qui le culte rendu au Dieu trinitaire est primordial.  Contre Wittgenstein, les faits ne sont pas la réalité exclusive; il y a les lois, les normes, les principes, les valeurs qui constituent des entités logiques tout aussi déterminantes.  En conclusion, la science et sa productivité garantissent au mieux l’aisance et le confort mais non le bonheur.  Il n’est pas étonnant qu’un individu éprouve plus de joie par la rencontre inopinée d’un, de deux ou de trois de ses meilleurs amis que s’il filait dans  un bolide à cent milles à l’heure pour échapper à l’ennui à l’entrée d’un tunnel mais ensuite pour le retrouver tout de suite à sa sortie.

REFERENCES

 

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Hazard P. (1961), La crise de la conscience européenne, t..1 et 2.  Gallimard, Paris.

Hume D. (1779), Dialogues sur la religion naturelle, Ed. Hatier (1982), Paris.

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Mauriac F. (1951), La pierre d’achoppement, Éditions du Rocher, Monaco.

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Rahula W. (1998), L’enseignement du Bouddha d’après les textes les plus anciens, Seuil, Paris.

Wittgenstein L. (1993), Tractatus logico-philosophicus, Gallimard, Paris.