S’il faut parler de Jacmel, au singulier comme au pluriel, je dirais qu’il y a trois traits qui
frappent dans toute son histoire :
Jacmel, mémoires et survivances: du début du 19eme siècle a aujourd’hui
S’il faut parler de Jacmel, au singulier comme au pluriel, je dirais qu’il y a trois traits qui frappent dans toute son histoire :
♦ Son désir d’indépendance (dans lequel il faut inclure l’esprit d’entreprise donc économique et l’esprit politique, dans lequel il faut circonscrire l’autonomie communale du passe).
♦ La capacité de concurrence qui a permis d’étoffer l’esprit d’indépendance.
♦ Le progrès communautaire durable dont les vestiges restent , a coup sur, le Lycée Pinchinat, l’usine hydro-électrique, les réservoirs d’eau potable de la SNEP.
En effet, depuis sa création en 1698, Jacmel a toujours su faire montre d’une indépendance bien remarquée et remarquable. Le contact des flibustiers français et des négociants espagnols et anglais qui, les uns pillant et les autres continuant a défier les éléments de la nature et la précarité des moyens économiques existant alors, n’ont fait qu’aiguiser cette indépendance ou l’esprit d’entreprise est a la base de tout.
Le premier acte permettant de jauger cette indépendance fut l’établissement de comptoirs commerciaux, ce que nous appelons aujourd’hui les ports. Ces comptoirs commerciaux ou le troc était de mise ont permis de poser les fondations de la ville et des communautés avoisinantes grâce au sédentarisme qui l’accompagne.
La région fournissait alors en abondance le pétun (ou tabac), l’indigo, le bois du Brésillet, la figue banane et enfin, le café. Selon Louis P. Baptiste, ces denrées étaient très prisées par le commerce international au 19eme siècle : « Il importait des lors, pour le nouveau comptoir, de défendre son commerce contre les concurrents et contre la métropole qui lésait ses intérêts. Ceci est important et semble être la première page de l’histoire de Jacmel qui ne sera toujours que celle de la défense de son travail contre les empiétements de tous genres ». (Cite in JACMEL, SA CONTRIBUTION A L’HISTOIRE D’HAITI par Gilles Jean-élie, Editions des Antilles, 1996, p.15).
Un exemple assez probant peut se résumer dans le cas du tabac qui était alors vendu a prix fort aux Hollandais qui venaient jusque sur les cotes de Jacmel pour en acheter. Or, voici qu’un édit du roi de France décide que la production du tabac de la colonie devra être vendue aux négociants de France aux prix qu’ils feront. Cet empiétement sur la liberté du commerce des habitants de Jacmel fait que « de fureur, raconte le Gouverneur Ducasse, quantité d’habitants ont arrache leur tabac. Ceux qui ne l’ont point fait ne peuvent le vendre ni aux fermiers, faute d’argent, ni aux autres, de peur de confiscation » (Journal intime de Ducasse, BNP).
Cet incident majeur du café provoqua la chute du Gouverneur Ducasse, le fondateur de la ville de Jacmel, qui fut oblige de s’embarquer pour la métropole. Il faut y voir aussi l’élément clef de la manifestation d’un esprit Jacmelien identique qui s’est manifeste a travers les régimes politiques et le temps : « la garde meurt et ne se rend pas ! ».
Cet esprit jacmelien semble toujours pivoter autour des axes : liberté de commercer et de travailler ; le souci de la justice pour la sécurité des vies et des biens.
Ville de gens pratiques portes vers le commerce, l’agriculture et l’artisanat, ce sont ses activités économiques qui lui ont permis de faire concurrence, fruit d’un désir de mieux s’attacher la clientèle des producteurs, a commence par se consolider a travers l’établissement de maisons avec chambrettes pour héberger les paysans producteurs.
Vers cette époque de prospérité (1715-1930), tout le monde était commerçant. La politique, la philosophie, la poésie, la littérature, les arts plastiques, le droit et les autres arts libéraux se pratiquaient en parallèle avec les spéculations des denrées telles : le cacao, le café, le maroderme, l’indigo, la pelure d’orange, le safran, le vétiver, qui étaient pesées dans les balances.
Parce que le Jacmelien d’alors était jaloux de son indépendance économique qui dépendait de son commerce avec l’étranger, il affichait une intégrité légendaire qui ne se laissait pas marchander par la politique. Nos premiers politiciens chevronnes et de métier tels : Alcius Charmant, Desilus Lamour, Alcibiade Pommayrac, Mode, Pierre Fréderic et j’en passe… furent donc , avant tout, des esprits indépendants qui ne pensaient qu’a utiliser la politique pour faire de leur bourgade natale un point de mire ou l’opinion indépendante était l’essence de la vie sociopolitique. Puisqu’on disait a l’époque que Jacmel était plus prés de Paris que de Port-au-Prince, nos politiciens de l’époque se sont donc concertes pour faire profiter au maximum a la ville de bien des choses, au nom de sa renommée. Alcius Charmant qui avait étudié a Paris acheta 100 pilonnes électriques pour l’électrification de la ville de Jacmel en 1896, quand le Baron Haussmann faisait la réfection de Paris. Il était alors jeune député. Cette action grandiose fut bientôt suivie de l’invitation d’une série de célébrités qui enseignèrent au Lycée Pinchinat de Jacmel. Il faut citer parmi ces messieurs, Le Révérend Père Lacordaire, Debray Aine, l’ami intime de Victor Hugo qui rêva pour un moment de voir l’ile d’Haïti et dont la correspondance avec ce dernier fait honneur a notre ville ; Paul Gauguin, le célèbre peintre postimpressioniste et primitiviste qui prit pension a L’Hôtel International chez Monsieur Joseph Fraenckel, le propriétaire original du Manoir Alexandra et qui possédait dans sa collection 5 fusains du grand peintre ; Jean Coquelin et Madeleine Renaud de la Comédie Française, Horace Camille Desmoulins, le fils du célèbre journaliste de la révolution française de 1789, Camille Desmoulins et j’en passe…
Parce que la ville d’alors se groupait autour de son église et de son marche, quand les voyageurs arrivaient par le port la nuit, ils voyaient une masse lumineuse, d’où le qualificatif de JACMEL, VILLE LUMIERE.
Ces messieurs et dames de Jacmel, polices par les bonnes études classiques, les multiples voyages en Europe agrémentes d’une somme d’expériences sont revenus dans leur ville natale, férus d’urbanité et d’entregent et le commerce leur permettait d’avoir une indépendance politique certaine.
N’est-ce pas le grand écrivain, Constantin Mayard qui, en 1930,rendait hommage a ces hommes d’une autre crue quand il pensait que derrière la balance d’achat de denrées, son comptoir de vente, dans son atelier, son cabinet ou sa clinique, le Jacmelien était avant tout un travailleur jaloux de décider pour lui seul de l’avenir de sa ville ?
Parce que cette ville était composée d’hommes indépendants, économiquement, qui ne se laissaient pas acheter par la politique et les politiciens, vu qu’ils étaient en dehors de la course aux fonctions publiques, le Jacmelien afficha une morgue implacable et ostentatoire, tout au long de son histoire. Cette morgue implacable se révèle dans son esprit très critique à l’ endroit de tout ce qui est politique. Voila pourquoi tout (e) Jacmelien (nne) est politicien dans le sang, même si il /elle ne veut pas l’admettre.
Il a fallu des événements supérieurs de la nature, tels que les ouragans et les cyclones et d’autres fomentes par les négligences, l’ambition et la méchanceté des humains tels que : le feu, les guerres civiles, les dictatures féroces, l’embargo, l’instabilité politique et son cortège de maux… pour ramener le Jacmelien sur terre.
Si le Jacmelien sait faire preuve de fierté, a cause de son indépendance chèrement acquise et gérée, il sait aussi faire preuve d’actes humanitaires qui vous laissent pantois. Je me rappelle avec bonheur ici l’histoire de Melcour Poux, l’un des premiers millionnaires Jacmeliens qui, pour remercier le ciel d’avoir épargné sa maison et ses millions qui se trouvaient dans un coffre-fort de sa cave et qui allaient être transportes dans une banque suisse quand survint l’incendie de 1896. Devant la désolation de cette ville qui lui avait permis de s’enorgueillir d’avoir bien travaille, il n’a pas eu le courage d’envoyer ces millions en terre étrangère. Aussi, crut-il bon de réunir ses concitadins pour leur demander de remettre sur pied leurs négoces en leur prêtant, sans taux d’intérêt l’argent qu’il avait gagne, sous la seule condition « de rebâtir la ville, dit-il, quand leurs affaires auront prospérées ».
Vous faut-il un plus bel exemple d’altruisme, de sacrifice et d’abnégation ?
Et pourtant, comme tous les Juifs de sa génération tels les Munchmeyer, les Fraenckel et autres, ils se voyaient ridiculises au cours du carnaval de chaque année a traves le masque du Juif-errant, dont les chansons furent rapportées de France par les autres colonies étrangères jalouses du succès des juifs allemands et français de Jacmel. Cette tradition raciste fait encore partie intégrante de notre carnaval actuel .
Ces Jacmeliens d’antan avaient foi en leurs capacités humaines et, parce qu’ils savaient qu’ils n’avaient rien a envier aux habitants des autres villes du pays ou des iles avoisinantes, ils consacraient donc le clair de leur temps a forger ce caractère du Jacmelien qui se remarque encore parmi certaines personnalités de la génération de nos parents. Ces valeurs sont passées en nous, en filigrane. Cependant, avec l’américanisation a outrance de notre système social, politique et économique, y-a-t-il une chance de sauver ce qui doit être sauve ?
La mondialisation a laquelle personne ne peut échapper ne peut nous aider que dans la mesure ou nous pouvons garder notre spécificité propre, tout en nous engageant de plein pied dans le progrès du village global qu’est devenu le monde, grâce a l’internet, au téléphone portable et aux satellites.
Il y a donc des chances pour que notre génération actuelle puisse redorer le blason de cette ville. Certains esprits pessimistes croient qu’il est impossible de refaire de Jacmel ce qu’elle a été en fonction des réalités misérables du quotidien et, le poète Norbert Xavier Sylvera a exprime en sentiments assez forts, l’écho de leur croyance en disant dans son « Faux Sonnet a Jacmel » :
Si l’air que tu respires sent fort le chocolat
Si tu existes encore, malgré le lâche oubli,
Tu sais, ni ton ciel bleu, ni la douceur des filles
Ne pourront t’empêcher de vomir ton trépas.
Tu crois revivre un jour ? On ne se refait pas…
La gloire, tu l’as eue, forte comme un rasoir
Mais la lame émoussée a beau être aiguisée
Quand la peau a vieillie et qu’elle s’est fripée.
Il ne te reste plus comme humble fierté
Qu’a laisser tes longs crins cacher ta pauvreté,
Estomper un visage beau, vieux et alangui
Et que personne ne voit plus comme jadis
O Jacmel ! Tu attends une heure de renouveau
Tu ne l’auras pas plus que les Romains n’eurent Rome
Pour autre vocation qu’être un musée nouveau (1986
La poésie a toujours été un point fort dans le caractère de l’haïtien et, le jacmelien, n’est pas exempt de ce fait. Il compose ses poèmes pour chanter ses doutes, ses problèmes, ses amours et la vie quotidienne de son pays. Il faut cependant faire remarquer que si quelquefois il y a des poèmes qui traversent le temps sans perdre un pli de leur chaleur sentimentale, d’autres sont vraiment circonstanciels. Les sujets qu’ils chantent peuvent changer de substance selon les données du moment. Tel est le cas du poème de Sylvera qui ne peut être délecté que par les esprits pessimistes.
La réalité est dure mais malheureusement c’est la réalité. Pour certains d’entre nous qui avions voyage et acquis une certaine expérience du monde, nous savons et croyons que ce sont les hommes responsables qui donnent voie au progrès de leur peuple. Leur passion pour le développement de leur pays est comme le levain qui doit faire lever la pate de leur volonté pour changer les données pessimistes en possibilités acquises au fil des événements, au profit du changement a opérer, de l’attitude à adopter.
La poésie a toujours été un point fort dans le caractère de l’haïtien et, le jacmelien, n’est pas exempt de ce fait. Il compose ses poèmes pour chanter ses doutes, ses problèmes, ses amours et la vie quotidienne de son pays. Il faut cependant faire remarquer que si quelquefois il y a des poèmes qui traversent le temps sans perdre un pli de leur chaleur sentimentale, d’autres sont vraiment circonstanciels. Les sujets qu’ils chantent peuvent changer de substance selon les données du moment. Tel est le cas du poème de Sylvera qui ne peut être délecté que par les esprits pessimistes.
La réalité est dure mais malheureusement c’est la réalité. Pour certains d’entre nous qui avions voyage et acquis une certaine expérience du monde, nous savons et croyons que ce sont les hommes responsables qui donnent voie au progrès de leur peuple. Leur passion pour le développement de leur pays est comme le levain qui doit faire lever la pate de leur volonté pour changer les données pessimistes en possibilités acquises au fil des événements, au profit du changement a opérer, de l’attitude à adopter.
En effet, d’autres poètes tels que : Alcibiade Pommayrac, Charles Moravia et d’autres pensaient que tout le progrès, toute la prospérité de Jacmel ne peut venir que de ses enfants qui ont en ressource des idées. L’écrivain, Louis P. Baptiste lui croyait que cette prospérité ne peut venir que de notre port, malgré le dépérissement du café et des autres denrées qui nous apportaient la richesse économique et l’indépendance d’esprit. Dans son poème intitule « Et Voici Jacmel », il semble avoir fait un résumé de tous les sentiments optimistes, quand il a écrit les verts suivants :
« … Que de métaux divers dans le creuset colonial ont forme l’acier
Solide de tes fils au dynamisme cosmique….
Endiables de combativité féroce et d’un âpre mépris de la mort.
Jacmel, tu respiras et regardas la mer en face
Tu devins une ruche et partout semas la beauté.
… Solitaire et muette, tu demeuras longtemps
Cette citadelle inquiétante qui donnait froid a l’adversaire.
Chevalier servant de la liberté, pour elle, en deux sièges,
Tu te saignas. Miranda et Bolivar vinrent allumer leur torche
Au feu de la tienne pour l’embrasement de l’Amérique du Sud.
… Jacmel, multicolore dont le peuple s’adonne a son héroïsme quotidien
Jacmel au cœur innombrable, présent offert a tous, les contraires en toi
Se fondent en un métal d’amour.
Oui, tu restes un Djon au cœur de Gaiac….
Mais connaît-on le Gaiac au beau feuillage pailleté
Qui a les plus belles fleurs du monde ?
Ainsi le Djon, ainsi Jacmel !
Comme vous le savez déjà, Mesdames, Messieurs, l’habitant de Jacmel s’appelle un Djon. Il faut faire remarquer que la poésie la meilleure est celle qui nous fait épouser les tendances philosophiques conduisant a la sagesse. Je disais tantôt que nos parents et arrières grands-parents pensaient que du port nous arrivait toute notre prospérité, en tant que ville côtière. J’y ai toujours cru et j’y crois encore.
Le titre de cette conférence en s’intitulant : JACMEL, MEMOIRE ET SURVIVANCES DU 19eme AU 20 e SIECLE tombe a pic pour notre situation actuelle ou nous refaisons les mêmes gestes, affichons les mêmes croyances que nos aïeux, avec cette seule différence qu’il nous faut les adapter au monde moderne. Ce monde moderne ou toute la publicité et la propagande négatives pour notre pays tourne autour de notre pauvreté. Oui, Mesdames, Messieurs, notre port doit être la future mine d’exploitation qui nous permettra d’engendrer la richesse via l’emploi qui viendra de l’industrie du Tourisme.
En effet, quand on visite nos cotes des Anses a Pitres aux docos du Parc la Visite, a l’ombre du Morne la Selle, on ne peut s’empêcher de ne pas croire que l’industrie du Tourisme ne peut pas devenir une histoire a succès pour notre coin de terre natale.
Imaginez, pour un moment, Mesdames, Messieurs, des routes décentes conduisant au Fort Oger, a Fort Baguette et aux criques avoisinantes ; a Cascade Pichon, a Bassin Bleu, au Parc la Visite ; des voiliers conduisant des touristes aux rochers du Colombier, a l’indigoterie coloniale de Bainet et aux autres touristiques du Sud-est ?
Imaginez les grottes de stalactites et de stalagmites de Fondwa, des Marigots, de Cap-Rouge, la cathédrale indienne de Bassin Bleu, toutes encore inexplorées, recevant des visites touristiques dans une ambiance tropicale chaude ou l’habitant peut vendre sa figue banane, ses tablettes et autres mets succulents ; ou les visiteurs de notre département peuvent apprendre a apprécier notre hospitalité tout simplement.
Imaginez, dis-je, des infrastructures décentes telles des cases bien propres, des bars bien approvisionnes regorgeant de boissons locales autant que celles qui ont fait leur preuve dans l’opinion internationale, permettant a nos visiteurs d’avoir des souvenirs chauds de leur visite de notre terroir ; lesquelles visites ne se résumeront pas seulement aux cartes postales achetées sur le tas et dans des photos trop souvent malencontreuses, présentant seulement les fatras de nos rues.
Imaginez nos anciennes maisons restaurées, comme le local de l’Alliance Française de Jacmel ; nos rues bétonnées bien propres et moins encombrées de marchandes. Imaginez toute cette richesse qui nous est léguée par les générations du passe, mise en valeur, à notre portée devenir un présent offert a tous.
Encourager l’artisanat d’art (sculptures, lampes, masques, bijoux locaux, etc.) et l’artisanat utilitaire (cruches, hamacs, chaises, paniers, chapeaux, etc). Imaginez nos artisans et artistes produisant des articles valables singuliers, insolites même. Appuyer la mise en place de l’écotourisme qui favoriserait des contacts plus étroits et une meilleure compréhension entre touristes et populations d’accueil, ou le respect de l’identité culturelle et la préservation d’installations touristiques originales et typiques. L’urbanisme est un facteur important qui peut permettre de créer cette société de loisirs pour la sauvegarde des patrimoines et des valeurs, en faveur des générations futures.
Encourager le développement de pratiques commerciales électroniques dans l’économie locale pour une meilleure stimulation de coopération entre les acteurs concernes. Parce que les haïtiens sont passionnes de l’internet comme le reste du monde, les entreprises touristiques dotées de sites web bien conçus pourraient permettre a tous d’accéder au marche touristique international pour mieux cerner les 3 volets du triptyque : environnemental, économique, social permettant a l’honneur jacmelien d’avoir une meilleure conscience de son éthique de citadin, d’une cite dont l’histoire est toute ouverte sur le monde.
Un tel mouvement touristique rendrait notre vie sociale, culturelle et économique plus féconde, plus intense comme en 1870, quand Jacmel était le seul port du pays que touchaient les bateaux de la Royal British Mail. Cela déterminerait un grand mouvement d’affaires et de relations sociales entre les habitants de la cite et leurs visiteurs, au profit du sens de l’accueil et de l’hospitalité que le Jacmelien possède déjà a un degré aiguise.
Notre désarroi économique,- fruit de la politique de centralisation a outrance prônée par Duvalier père qui força les piliers de notre commerce a entrer dans l’ombre soit par l’exil force, la prison ou soit par l’exécution tout simplement,- fait qu’aujourd’hui on ne peut parler de mémoires et de survivances sans parler du développement économique de Jacmel, tout en mettant en exergue les concepts de centralisation et de décentralisation. Deux concepts qui ont leurs bon et mauvais cotes.
L’équation de ces deux concepts constitue la condition sine qua non qui doit permettre de balancer la promotion de la durabilité du développement dans le tourisme du sud-est, en vue de préserver la diversité culturelle et le dialogue des cultures.
Les populations de nos campagnes et des bourgs avoisinants ont envahi la ville a la recherche d’un mieux être, leur permettant d’envoyer leurs enfants a l’école et améliorer leur économie. En conséquence, une bonne majorité des populations de notre ville a émigré vers l’étranger en fonction des circonstances politiques et économiques les tenant par les tripes et forçant ceux qui y sont retournes ou restes a vivre l’explosion démographique et la misère avec stoïcisme.
N’est-ce pas Taine qui disait déjà « Qu’on est toujours ce que l’on a d’abord été ! » ?
Ce mot semble venir a point pour qui connaît Jacmel ou tous les apports nouveaux aux traditions séculaires de l’esprit jacmelien fait de toutes nos générations une seule entité.
Voila pourquoi la génération actuelle a donc pour devoir de mémoire de mettre toute son énergie pour que cette ville renaisse et prospère, en partenariat avec nos amis internationaux qui ont pense a faire de Jacmel un point d’arrêt pour cette confrontation et collision du réel et de l’imaginaire qu’est CAP SUR LES PORTS FRANCOPHONES.
En obéissant a notre vocation première qui est celle de la refonte de notre moi en l’autre « ou toute poétique est possible » pour reprendre les mots d’Edouard Glissant, le devoir de mémoire de notre génération n’aura donc de valeur que dans l’engendrement de richesse, comme tradition. Et, l’industrie du tourisme est actuellement la voie royale qui peut permettre a cette génération de garder souvenance de la mémoire des anciens dont ils se disent si fiers.
Si l’indépendance de l’esprit d’entreprise avait permis aux générations du passe de faire de Jacmel une citadelle de l’autonomie communale et que la concurrence permettait d’arriver a un progrès communautaire durable, n’est-ce pas notre privilège de savoir que nous avons des amis dans le monde qui pensent encore venir nous voir et nous aider pour des lendemains meilleurs ?
Bibliographie :
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CONJONCTION, revue de l’Institut Français d’Haiti, numeros 156-160, Janvier 1983-1984 ;
DEPESTRE, René, Rage de Vivre, Œuvres Poétiques Complètes, Seghers, France, 2006
GILLES, Jean-Elie , Jacmel, sa contribution a l’Histoire d’Haiti, Tome I,1996,Editions des Antilles, Port-au-Prince ; Tome II, 1998, Educa Vision, Coconut Creek, Miami, Florida ;
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Jacmel et la Poésie Haïtienne, 1ere livraison, Imp. Des Antilles, Port-au-Prince, Haïti, 1967
MORISSEAU-LEROY, Felix Les Djons d’Haiti Thomas, l’Harmattan, lettres des Caraïbes, Paris, France, 1996
Revues consultées :
AYA BOMBE, collection 1947-1949
CAHIERS D’HAITI, Aout 1934-Dec. 1951, Kraus Reprints,
ECHO PAROISSIAL DE JACMEL, collection 1954-1956
FEMINA, Dec. 1923-Janv 1925, PauP, Imp. Cheraquit
L’ECRAN, journal mensuel de Jacmel, collection 1972-1987