Au Pôle Nord… là où se cristallisent de sempiternelles légendes, on ne fait pas que se réjouir en dévalant sur des lames de ski l’encolure des cimes enneigées au pied de ces chalets de bois rond, après avoir dégusté en galante compagnie d’onctueux et chauds breuvages; tout en étrennant joyeusement au solstice de l’hiver, sous des sapins, des cèdres et des épicéas couverts de floches de neige immaculée, de très nombreux et mirifiques cadeaux tombés d’un traîneau stellaire, tiré allègrement par deux grands rennes célestes que dirige dans l’air boréal frigorifié un génie bienveillant, un barbu vénérable et bienfaisant, un solide gaillard au bonnet rouge et blanc transportant un énorme sac d’abondance, le mythique Père Noël escorté dorénavant, en plus de ses verts et rouges lutins, de l’imposante Mère Noël…
Chroniques de Noël et du Nouvel An
Au Pôle Nord… là où se cristallisent de sempiternelles légendes, on ne fait pas que se réjouir en dévalant sur des lames de ski l’encolure des cimes enneigées au pied de ces chalets de bois rond, après avoir dégusté en galante compagnie d’onctueux et chauds breuvages; tout en étrennant joyeusement au solstice de l’hiver, sous des sapins, des cèdres et des épicéas couverts de floches de neige immaculée, de très nombreux et mirifiques cadeaux tombés d’un traîneau stellaire, tiré allègrement par deux grands rennes célestes que dirige dans l’air boréal frigorifié un génie bienveillant, un barbu vénérable et bienfaisant, un solide gaillard au bonnet rouge et blanc transportant un énorme sac d’abondance, le mythique Père Noël escorté dorénavant, en plus de ses verts et rouges lutins, de l’imposante Mère Noël…
Descendants de ces caciques infortunés, de colons prédateurs, d’esclaves torturés et des révolutionnaires tourmentés, l’on se souvient avec une nostalgie teintée d'amertume du pays-en-dehors : là où les canards sauvages cohabitent avec des pintades marrons et des
poules cayettes, picorant à longueur de journée en de vieilles masures aux murs de glaise et de roseaux tressés, au sol de terre battue et couvertes de tôles perforées; lesquelles laissent s’égoutter l’eau de pluie et s’infiltrer les rayons de soleil ou de la lune;
Là où le loup-garou, des contes et légendes féeriques de nos grands-mères parfois bien plus réels que fictifs au pays magique et mystérieux, a droit de mort et de vie sur les bébés joufflus à leur naissance; là où les chiens galeux couchent à la belle étoile pour éloigner les mauvais-airs qui rôdent la nuit, dès l’Angélus jusqu’au vibratoire cocorico des gallinacés à l’aube triomphante des bourgs adossés aux montagnes; lesquelles regardent la mer par-dessus la crête des collines ombragées de cocotiers, de manguiers, de cerisiers, de citronniers, de palmistes et d’amandiers;
Là où au pipirite-chantant, la bouse des équidés parsème en mottes régulières le sentier rocailleux poussiéreux; là où des chevaux arabes chevauchent les ânesses pour procréer des mulets; là où le braiement des bourriques fait fuir les rapaces et lâcher prise aux caïmans caraïbes, aux rancuniers crocodiles… là où des juments en rut excitent la jalousie des mâles et piègent des étalons dominants, de robustes et puissants inséminateurs; là où des gamins espiègles grandissent tout nus, circulent avec leur fustibale bringuebalant pour chasser ortolans, ramiers ou wangas-nègès (oiseaux-mouches ou colibris), et pisser l’un plus fort mais l’autre plus loin en jet de fontaine dans la rue bruyante, parmi des ânes surchargés de sacs-paille en piste, lourdement remplis de victuailles, et aussi des chats errants affamés, aux aguets… en quête de blanches souris;
Là où le jardin devant les chaumières fleure bon la verveine, le basilic, la citronnelle; et les péristyles, le parfum du jasmin de nuit, du bois de rose, de vétiver et d’ilang-ilang; là où des initiés sages et moins sages se rencontrent la nuit en société secrète sous un mapou géant, tutélaire et complice, pour procéder à des libations, des incantations ésotériques transmises de génération en génération, depuis la nuit des temps, qui leur viennent des mages de l’Égypte pharaonique, des musulmans d’Arabie à la pierre noire, la Kaaba, des nègres guinéens et marrons venus d’Afrique, des indiens Taïno, Arawak, des alchimistes, francs-maçons et catholiques apostoliques romains de l’Europe médiévale superstitieuse, initiatrice de l’Inquisition meurtrière et coupable;
Là où les vagues agitées de la mer limitrophe font écho au clapotis des rochers et au chant guttural des pêcheurs qui respirent à plein poumons les remugles des fonds marins dans leur barque remplie d’algues et de coraux, de poissons et de crustacés, aux pieds de ces montagnes verdoyantes de caféiers et de cacaoyers, de campêche et de pineraie; là où l’on s’approvisionne en eau de puits artésien et en eau de source cristalline dans des calebasses évidées et des jarres d’argile;
Là où l’on mange à sa faim du riz collé aux haricots rouges ou noirs au goût agréable de lait de coco et au fumet des tri-tri, cuit à point et servi dans de vertes feuilles de bananier; là où l’on déjeune de maïs moulu au hareng saur, de banane bouillie au foie dur et mou; là où l’on se revigore d’un bouillon tèt kabrit (tête de cabri), de cervelle de bœuf, de boudin noir de porc, de poisson gros-sel;
Là où l’on collationne de royale : cassave avec de l’avocat, du beurre d’arachide et du cresson; là où l’on se désaltère de jus de grenadine et de grenadia; là où l’on savoure et se rassasie de bonbon sirop; là où l’on boit du lait de vache fraîchement tiré de la pie et bouilli sur trois pierres au feu; là où l’on mange du pain-patate et sirote du thé à la cannelle, du pain maison avec les pointes trempées dans du café presque bleu de haute montagne, fraîchement recueilli du pilon et filtré aux grègues;
Là où l’on balaie sa galerie avec un rameau de palmiste, et après l’avoir arrosée, la bénit au nom des loas des ancêtres : de parfum florida, des graines de madioc et de roroli; là où l’on prend son bain à la rivière derrière son petit cabanon ; là où l’on s’éclaire le soir venu, à l’aide de petites chandelles, de misérables bougies de cinq kòb, de lampes tèt-gridap à l’huile de kérosène, psalmodiant un verset de la Bible tenue parfois tête-en-bas; là où les massisi coriaces ne constituent pas la norme, ni la règle mais où le séssé efféminé de la bourgade est l’exception qui réveille plus tôt la curiosité, l’étonnement, de la pitié et l’humour grivois...
Là où il n’y a pas de boîte de nuit ni de prostitution il-légale; où l’on joue, prie, mange, rit et danse ‘au clair de la lune mon ami pierrot, prête-moi ta plume pour écrire un mot’...; où l'on va voir le papa loa, le nègre ginen, le nibo aousa, le cousin marasa, la septième fille de la famille, le clairvoyant, le jeteur de sort; celui qui réveille les morts pour y voir clair, le baron samedi au cimetière; celui de qui on achète des points, qui octroie des vents guidant le trajet des voiliers sur la mer; le galipote qui parcourt le soir et la nuit plusieurs centaines de kilomètres; là où les sorciers magiciens accomplis volent la nuit,
au faire-noir des ténèbres par quel subterfuge dont on ignore le mécanisme?
et des feux dans leurs orifices; là ou les incestes sont fréquents et la race kabrit n’est pas rare; là où le partage, la solidarité est un devoir inné, un mode de vie traditionnel; là où l’on soutient les rails : complaintes, cris et lamentations dans les cas de mortalité, des décès regrettables et inopportuns;
Là où l'on consulte le houngan, le ounsi, le bòkòr, le guérisseur, le sorcier,le papa loko, le guédé zarenyen, le chanpwèl, le zobob, le zago loray, le bizango, le loa lenglensou, baron samdi, erzuli fréda, erzuli jé wouj, simbi nan dlo, papa agoué, ogou feray, la mambo, erzuli bèl fanm, vyèj mirak, gran’n brijit...
Là où l’on se saoule de tafia, de mauvais clairin, d’absinthe, de mabi; là où l’on se juche aux cocotiers pour se désaltérer, étancher sa soif en fin d'après-midi suite à la grande corvée du Coumbite dans les champs er les rizières afin de repérer au loin si la diligence d’occasion venant de la ville arrivera en mi-soirée pour repartir tôt, à la bonne heure, le lendemain; là où il n’y a pas d’hôpital, pas de caserne, pas de chapelle, pas de théâtre ou de cinéma, pas d’église, pas d’école, pas de police, pas de prison, mais des grandèt vénérables et un choukèt lawouzé actif, redouté, pourvu d’aides de camp intrépides : des chargés de pouvoirs;
Là où les aînés aux cheveux blancs, des vieillards édentés à l’ossature pesante exercent encore de l’autorité, sont l’objet d’estime et de respect; là où les adultes parlent, les enfants écoutent; les hommes commandent, ordonnent, dirigent et les femmes coopèrent, acquiescent ou obéissent prestement c’est selon…; là où les gens ne meurent presque jamais de maladie naturelle ou de vieillesse mais surnaturellement.
Ils transcendent dans d’autres dimensions, partent au pays sans chapeau, sans panama, sans casque ni casquette ou chapeau-paille, sans voile protégeant en voyage du soleil accablant, sans melon, sans chapeau de cowboy, sans béret, sans couvre-chef ou canotier, sans coiffe, sans capuchon, sans képi, sans cape... vers là où l’on déambule en flottant sur des nuages vaporeux à découvert, la tête dénudée prête à la tonsure consacrée aux élus ou à la faux du salaire du péché dans le Tartare au Shéol éternel.