Quand j'étais gosse, avec ma mère, j'allais souvent à Gelée, cette zone historique qui a vu naître le Premier Littérateur Haïtien, le Rédacteur de l'Acte de l'Indépendance d'Haïti, l'Immortel Boisrond TONNERRE, contrairement à ce que nous ont appris nos professeurs de Littérature Haïtienne en classe de Troisième Secondaire.

 

À cette époque, la rivière de Gelée, passant sous le Pont Salomon, côtoyant la route qui conduit vers Torbeck, en traversant dans les broussailles, se jetait directement dans la mer. Il n'y avait pas cette rigole stagnante, boueuse, sale et malodorante qui s'étend sur près de deux cents mètres en face de cette mer calme dont les vagues viennent mourir doucement à vos pieds sous une brise légère qui vous caresse les yeux, le visage et les cheveux tout en vous invitant à faire un p’tit somme.

Quand j'étais gosse, avec ma mère, j'allais souvent à Gelée, cette zone historique qui a vu naître le Premier Littérateur Haïtien, le Rédacteur de l'Acte de l'Indépendance d'Haïti, l'Immortel Boisrond TONNERRE, contrairement à ce que nous ont appris nos professeurs de Littérature Haïtienne en classe de Troisième Secondaire.

À cette époque, la rivière de Gelée, passant sous le Pont Salomon, côtoyant la route qui conduit vers Torbeck, en traversant dans les broussailles, se jetait directement dans la mer. Il n'y avait pas cette rigole stagnante, boueuse, sale et malodorante qui s'étend sur près de deux cents mètres en face de cette mer calme dont les vagues viennent mourir doucement à vos pieds sous une brise légère qui vous caresse les yeux, le visage et les cheveux tout en vous invitant à faire un p’tit somme.

Les grands amandiers étaient déjà là. Enfants, on se régalait des amandes qui en tombaient, blanches ou violettes, à l'intérieur, avec la chair très sucrée. Une première marchande de fritures est venue prendre place entre les amandiers, les raisins de mer et les icaques, ces deux arbres derniers aux fruits, très prisés des enfants ont disparu, émondés, déracinés même par de nouvelles marchandes qui sont venues ériger leurs tentes et donnant un tout autre aspect à la plage. Jusque dans les années 84/86 la vie sur la plage ne coûtait pas grand’chose. Avec soixante quinze centimes, on pouvait manger un bon plat de fritures: bananes pesées, patate frites, « véritab fri parèt sou plàj saa pou la premyè fwa ». C'était à la surprise et pour la joie des fins gourmets.

 

À partir de 1989, les choses ont changé avec cette équipe de jeunes cayens fougueux, menés par Thierry Larrosilière, qui ont organisé le festival de Gelée pour la première fois. Ils l'ont greffé sur la Patronale des Cayes, le 15 Août et c’est devenu depuis lors une tradition. C'est ce festival avec son organisation impeccable qui a amené et fait demeurer sur la plage de nombreuses nouvelles marchandes qui se sont, avec le temps, imposées à la clientèle sans cesse grossissante et, les visiteurs curieux, venus de partout ont généré une explosion de publicité autour du nom de cette plage. C'est de cette panoplie de marchandes qu'est venue Marie Lucienne MASSENA AUGUSTE, que l'on va appeler affectueusement "MA TANTE". Elle est de Gelée. Elle appartient à cette prestigieuse famille de la zone. Elle est de la Génération de Denise Bernabé, Rodrigue Philipo, Marie Lourdes Blanc, Julio Blanc, etc.

Gelée bat le record tant national qu'international pour ses plats préparés par ces mains expertes de cordons bleus dont MATANTE, chez Bertrand et tous les autres. Les connaisseurs privilégient les plats de Gelée par rapport à ceux de Port Salut et même de LABADEE dans le Nord. MATANTE est la première, la meilleure.

Matante, dans le langage vernaculaire, a deux connotations. La première, c'est la sœur de papy ou de mammy, une parente alors. Donc beaucoup de respect, d'amour, d'affection, de tendresse même pour cette personne qui nous donne tout naturellement la réciprocité. La deuxième a un sens plus bas et plus ou vulgaire. C'est celle qui tient une petite maison clause où l'on va, loin des yeux indiscrets et a meilleurs prix qu'un hotel. Le macho disait a la donzelle qu'il l'emmenait voir une tante. Prendre ses ébats avec celle ou celui qu'on aime. Or, à Gelée, ce vice n'existait pas encore. Lucienne avait le don de flatter le palais de ses clients. Lucienne était donc cette tante affectueuse, débordante de cordialité.

Sa physionomie débonnaire, l'accueil chaleureux qu'elle a toujours réservé à ses clients qui, très souvent, sont obligés de faire la queue avant d'être servis lui ont carrément valu ce surnom affectif. Elle avait toujours un je ne sais quoi de charmant, de doux et de gentil dans ses conversations. Elle n'avait pas fait de grandes études qui aurait fait d'elle un agent de marketing. C'est pourtant quand on s'accroche à elle, on ne veut pas et on ne peut pas en démordre. Ses plats n'ont jamais le même arôme, les mêmes saveurs que ceux des restaurants voisins.
CHEZ MA TANTE, un restaurant à nul autre pareil sur la Plage de Gelée. MATANTE est connue nationalement et même internationalement. Car les étrangers qui y sont passés pour la première fois ont toujours emporté avec eux le fumet exceptionnel de ce poisson frit ou bouilli, ce lambi boucané ou en sauce. Et cette salade, ce « pikliz » dont la saveur restera à jamais attachée à votre palais !

La mort, a des rigueurs à nulle autre pareille, a dit FRANÇOIS DE MALHERBE. Ce sont ces rigueurs qui l'ont poussée à venir chercher notre chère Matante et l'emporter on ne sait où, nous privant ainsi de tous nos plats préférés, de toutes ses bonnes gâteries. Matante peut partir calmement; car il ne manquera pas de ses multiples clients à prier pour que Dieu l'accueille dans son paradis.

Que son âme et celles de tous ses fanatiques qui l'ont précédée, reposent en paix !
 

Jean William GUILLAUME


NÉ AUX CAYES. 


PROFESSEUR DE FRANÇAIS, D'ANGLAIS, D'ESPAGNOL, DE LATIN ET D'HISTOIRE. PRÉFET DES ARRONDISSEMENTS DES CAYES ET DE PORT SALUT. SUPERVISEUR DÉPARTEMENTAL DU CEP DANS LE NORD OUEST( ÉLECTIONS…

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