Un nouveau contrat social est aujourd’hui incontournable et se présente sous de multiples formes dans le débat public.
Un nouveau contrat social est aujourd’hui incontournable et se présente sous de multiples formes dans le débat public. Les questions de justice sociale ont été tardivement acceptées en Haïti comme élément relevant à part entière du champ de la sociologie. Les analyses des soixante dernières années peuvent être considérées comme précurseurs dans la mesure où elles soulignent la place de la rhétorique méritocratique dans la reproduction des inégalités sociales tant au niveau politique que social. L’accès aux services et besoins de première nécessité comme la santé, l’éducation, et le travail sont des raisons valables pour l’homme haïtien de s’inquiéter, se questionner, et revendiquer ce minimum de l’être sociable de sa société. Qu'en est-il de la société haïtienne? Pourquoi diffère-t-elle tant de toutes les autres sociétés? Pionniers
Le rêve haïtien de vivre comme des humains, des êtres libres, avait été évanoui le 17 Octobre 1806 avec l'assassinat de l'Empereur Jean Jacques Dessalines. Il a repris conscience le 7 Février 1986, 180 années plus tard pour aujourd'hui sombrer dans l’oubli profond.
Il fallait attendre le milieu des années 80 pour que la question de justice sociale s’autonomise et que les différentes formes de justice sociale soient revendiquées en tant que telles. Cette émergence tardive de revendications sociales a été causée par les dictatures, et aussi par des facteurs tant externes qu’internes à la société haïtienne. D’abord, les intérêts de la classe dominante depuis l'indépendance d'Haïti pour la question des injustices sociales ne sont pas sans liens avec les préoccupations des pouvoirs publics de marginaliser les descendants d’esclaves en Haïti. L'oligarchie économique serait ainsi à l’origine des déboires du peuple haïtien depuis l'indépendance. Dès le début des années 90, un ensemble d'inquiétudes de cette oligarchie et consorts étrangers ont mobilisés les fausses théories démocratiques pour masquer à nouveaux frais la question des inégalités sociales.
L’émergence de la question de la justice sociale et même d'un nouveau contrat social pour la société haïtienne est donc étroite ment liée aux déboires dans les politiques publiques. Elle coïncide, de ce point de vue, avec la persistance des inégalités sociales en depuis l'indépendance jusqu'au tournant des années 1980-1990, et avec le renforcement des politiques inégalitaires institutionnalisées au cours des dix dernières années dans le domaine des revenus, de l’éducation et de l’emploi. La misère et la médiocrité sont instituées comme des faits normaux malgré le dégoût qu'elles inspirent aux citoyens soucieux de la chute libre des valeurs haïtiennes durant la dernière décennie. Elle est d'autant plus accentuée avec l’exacerbation de la sensibilité collective à l’égard des inégalités, partiellement imputable à la visibilité accrue de l'indécence et de l'immoralité sur la scène publique par la médiatisation des thèmes de l’exclusion, de la division, et de la fracture sociale.
La question de l'injustice sociale ouvre une fenêtre sur les attitudes et sur les pratiques courantes des individus dans la société. Nous assistons sans pouvoir y remédier à une institutionnalisation de la bêtise, de l'immoralité, et de la corruption à travers les différentes classes de la société haïtienne. Probablement l’influence du nouvel ordre mondial et celle de nouveaux critères de lecture de la société, plus attentifs à la manière dont le lien social s'organise en Haïti seraient la cause des nouveaux stratagèmes du statu quo pour dompter le peuple haïtien. La société haïtienne a été conçue comme pluraliste et individualiste dès l'indépendance. Le Vrai et le Juste ne devraient être définis d’en haut car la réussite collective dépend de la réussite des individus. La résolution des questions morales et politiques relèverait donc de l’activité et du travail des citoyens. Ce qui nous conduit à interroger les mécanismes nationaux de légitimation des politiques de franchises, de monopoles, des contrats gré à gré dans notre société. Notre observation des procédures de justification par lesquels certains fonctionnaires de l'Etat construisent des modalités de coopération avec la classe privilégiée ne pourrait être considérée que comme injuste, puisque cette coopération se fait au détriment des intérêts de la société haïtienne.
L’apparition de nouveaux paradigmes, délaissant les vraies structures institutionnelles pour concilier les intérêts d'une minorité, s'écartent de la dynamique d'un contrat social juste et équitable, ouvrant la voie à une interrogation sur le sens ordinaire de la justice sociale. La société haïtienne est devenue moyenâgeuse. C'est le décalage d'une société décadente, polarisée sur l'argent, le pouvoir, et l'immoralité au détriment du collectif. Alors que la classe moyenne s'amenuise, la classe possédante qui se conduit en nobles, se distance de plus en plus pour laisser un vide entre les intellectuels et les professionnels qui, par souci de se différencier du peuple, s'identifient à une élite vivant de miettes et de corruption. Le luxe des possédants est révoltant autant que la misère des masses est écœurante.
Gouvernance, leadership, et responsabilité sociale sont ce qui diffèrent la société haïtienne des autres.
Gouvernance
Nous constatons un manque d'éthique des élites en Haïti, plus spécialement du corps politique en situation de gouvernance. Si tèt la malad, rès kò a malad tou. Bien qu'il soit difficile d'insinuer un comportement idéal d'une élite ou d'un acteur de la gouvernance d'un pays ou définir la bonne gouvernance, il est toutefois possible d'avouer que la faiblesse de gouvernance ou la mauvaise gouvernance compromet tout le système hiérarchique, aussi bien que le gouvernement confié aux acteurs de gouvernance. Quelles sont donc les raisons de l'absence de gouvernance en Haïti? Les raisons et causes de manque de gouvernance peuvent se résumer en trois catégories:
- l'absence d'intérêt ou manque d'engagement
- conflits entre les gouvernants
- défaut de vertus des gouvernants
La constitution de 1987 est un obstacle majeur de la cacophonie de gouvernance en Haïti. Alors que le rôle de gouvernance est d'assurer la pérennité de la bonne marche des institutions dans le pays, la constitution de 1987 omet de léguer une dictature parlementaire pour freiner les exactions de l'Exécutif. Ce qui a conduit des parlementaires mal formés à abuser de ce pouvoir, exacerbant le mal aigu du mal de chef dans l'Haïtien, du coup débalançant la bonne marche de la séparation des pouvoirs. Le manque de vertu définit l'attitude des élus, auxquels la responsabilité de gouverner est confiée. Le comportement des parlementaires qui se veulent un pouvoir réclamant tous les privilèges des trois pouvoirs de gouvernance dans leurs circonscriptions tue les intérêts des deux autres pouvoirs de gouvernance. Le sauve qui peut s'insurge et s'institue parallèlement au concours de chef et d'exhibitionnisme’ politique. Avec un tel tohu-bohu, le leadership devient caduc et l'anarchie politique prend place.
Leadership
Le principal rôle de leadership est d'exercer une influence sur d’autres individus dans le but d'atteindre des objectifs fixés. Le poste qu'occupe un leader n'est pas seulement d'une importance hiérarchique, il réclame un statut. De là, les collaborateurs attendent d'un leadeur un certain comportement qui se veut exemplaire. Le leadership ne peut être effectif et efficace que s'il est accompagné de compétence et de goals clairement définis. Or, la confusion infuse dans la plupart des leaders haïtiens est qu'un chef est un leader. Ceux que nous pensons être des chefs puisqu'ils dictent, ils se prennent pour des leaders, alors qu'ils ne gouvernent pas par l'exemple. Un bon leader est un bon écouteur et suit l'évolution de ses collaborateurs. Avons-nous des leaders dans la gouvernance d'Haïti? Un leader, après tout, a un sentiment d'appartenance et se doit d'être socialement responsable.
Responsabilité sociale
La responsabilité sociale est l'impact subjectif des décisions prisent soit par une classe déterminée, une entreprise privée ou publique, une organisation, une entité, un gouvernement ou un citoyen. La responsabilité sociale n’est pas seulement une responsabilité d'hommes politique, elle se définit aussi dans les manières de vivre des citoyens. Une panoplie d'éléments tels que: les décisions d'achats, notre empreinte écologique, le choix de nos élus, l'aide aux œuvres caritatives, pour ne citer que ceux-là, s'arriment au bénévolat pour le citoyen d'être socialement responsable. En Haïti, la responsabilité sociale est vain mot puisque, le sentiment d'appartenance est générateur de la responsabilité sociale. Par exemple, acheter et consommer les produits locaux est un engagement continu et une responsabilité sociale du citoyen. Le choix des entreprises locales démontrent un engagement de promouvoir la production et la main d'œuvre locale. Un signe de gouvernance socialement responsable se comportant de manière étique et contribuant au développement des citoyens et du pays. Cette responsabilité sociale de la gouvernance traduit un leadership travaillant à améliorer la qualité de vie de l'individu et de l'ensemble. Faisons donc de preuve de responsabilité sociale. A qui profite notre irresponsabilité sociale?
De 1804 à aujourd'hui, l'homme haïtien ne fait que blâmer l'autre; s'entre-pousser comme des crabes pour faire échouer autrui. Wete kò w ban m fè w kou. Pa m pi bon. Tout cela, sans vision, sans objectif commun, sans leadership. Pis est, sans responsabilité sociale. Un pays doit être constitué de citoyens responsables, de leadeurs, et d'une gouvernance ayant des objectifs à atteindre. Haïtiens, sommes-nous enfin prêts à rebâtir Haïti?