Nanomédecine est la médecine sans frontière du future. C’est une médecine personnalisée jusqu’aux molécules…
Jean David Dumornay MD.
Nanomédecine est la médecine sans frontière du futur. C’est une médecine personnalisée jusqu’aux molécules…
Jean David Dumornay MD
La nanomédecine se pique d’utiliser les nanotechnologies pour développer des applications innovantes, et plus spécifiquement des nano-objets dans le domaine de la santé, grâce à l'exploitation des propriétés physiques, chimiques et biologiques des matériaux téléguidés à l'échelle nanométrique. Au début du XXe siècle, le scientifique allemand Paul Ehrlich théorisait l'idée du "magic bullet”: une "balle magique" qui serait dirigée spécifiquement et activement contre les agents infectieux au sein de l'organisme. Ce concept est aujourd'hui une réalité grâce à la vectorisation des médicaments permise par les nanotechnologies. En un mot, la nanomedicine va permettre des interventions de toutes sortes au niveau moléculaire.
Les Promesses Futuristes: Le monde scientifique médical est excité des promesses de la nanomédecine. Pour la première fois nous allons nous disposer de matériaux à l'échelle du nanomètre contrôlable à distance, qui permettra en effet d'agir à l'intérieur des cellules et de bénéficier de compétences totalement nouvelles et ahurissantes.
A quoi ressemble l'échelle de la nanomédecine? Voir encadré.
Globalement, les nanotechnologies permettent le développement de nouvelles techniques médicales de diagnostic, de thérapies et de suivi des patients. Cela va de la médecine préventive à la médecine de reconstruction, et nous parlons de reconstruction moléculaire infinitésimale. Les développements scientifiques d'aujourd'hui en nanomédecine permettront d'apporter de nouvelles réponses technologiques et d'améliorer considérablement les traitements à l'horizon dans les 10 à 20 prochaines années. Les applications de la nanomédecine rendront la prise en charge des maladies plus précise et plus adaptée. Elles se révèlent très précises par leur capacité à interagir de façon ciblée avec les tissus, les cellules, et même les molécules. A l'échelle "nano", certaines substances ou matériaux peuvent changer de propriétés et devenir plus résistants, plus réactifs...Sans être excessif, cette technologie promet de la chirurgie moléculaire purement et simplement.
Pour mettre tout ceci en perspective, considérons cet exemple. A l’intérieur du noyau d’une de nos cellules, un gène est défectueux et va causer un malaise dans les prochaines années. La nanotechnologie permet d’identifier le site du problème avec une précision impossible d’atteindre jusque-là. Des nano-chirurgiens (robots microscopiques) sont dépêchés sur place pour une intervention chirurgicale moléculaire précise. Le problème est résolu avant qu’il ne devienne une maladie déclarée. Déjà, nous prévoyons la création et l’utilisation des nano-agents comme ceux-ci.
Des nano-objets capables de leurrer le système immunitaire pour mieux traiter certaines pathologies.
Des nano-objets capables d'activer le système immunitaire afin de restaurer une réponse de l'organisme contre une pathologie.
Des nano-vecteurs ciblés spécifiques à certains types cellulaires pour libérer une substance active sans induire de toxicité dans d'autres types cellulaires.
Des nano-objets portant une étiquette fluorescente ou radioactive: capables de détecter précocement des perturbations fonctionnelles et permettant d'apporter une aide à la chirurgie guidée par l'image.
Les nanotechnologies permettront aussi de concevoir des nanocomposés contournant les phénomènes de rejet pour les greffes ou la médecine régénérative.
Les nanotechnologies seront également très utiles dans l'imagerie, en permettant "d'illuminer" une tumeur et de la rendre ainsi plus facilement visible par IRM pour des raisons à la fois diagnostiques et pour des micro-ciblages thérapeutiques.
Avec la nano-théranostique, ou la capacité à combiner au sein de la même nanoparticule administrée un médicament et un agent d'imagerie ou bio-traceur. On va être capable de soigner, tout en visualisant le parcours des particules et ainsi s'assurer qu'elles atteignent bien les zones ciblées dans l'organisme. Il ne sera plus question d’interventions aveugles. La nano-théranostique permet aussi de visualiser l'accumulation de nanoparticules puis de déclencher localement la libération du principe actif avec, par exemple, des microbulles activables par ultrasons ou par un champ magnétique.
Les nanomédicaments améliorent donc le rapport bénéfices/risques des médicaments en augmentant leur efficacité et leur biodisponibilité au niveau du tissu ou de l'organe cible, tout en réduisant les doses à administrer et le risque indésirable de toxicité des tissus ou organes d’à côté. Potentiellement, ce type de nanomédecine pourrait concerner toutes les spécialités médicales. C'est cependant pour l’oncologie et l’ophtalmologie qu'elle est la plus avancée : 19 nanomédicaments sont déjà commercialisés à travers le monde.
Des essais sont aussi conduits pour vectoriser des micro-ARN, c'est-à-dire des petites séquences de nucléotides. On est déjà en train de tenter de cibler le tissu cérébral, en tentant de franchir la barrière hémato-encéphalique. Si cette dernière est indispensable à la protection du système nerveux central, elle constitue un frein aux traitements de pathologies localisées dans la boîte crânienne.
La nanomédecine offre aujourd'hui des réponses aux difficultés rencontrées par la thérapeutique classique. La vectorisation d’ un principe actif, dont les propriétés physico-chimiques l'empêchaient jusqu'à présent d'être administrable tel quel, offre une détour sain et salutaire. Porté par le nanovecteur, le principe actif est en outre protégé par une dégradation biologique avant d'atteindre son tissu cible. Pour remédier à ce problème, les chercheurs procèdent à une simple modification de la surface des nanoparticules, ce qui permet de les rendre "furtives" vis-à-vis de nos défenses immunitaires.
La nanomedicine met en joue le “no-man’s land” en pénétrant au cœur des cellules. Les nanovecteurs peuvent être distribués dans des régions géographiques pré-déterminées, ceci implique de les déterminer au préalable afin de proposer une médecine personnalisée. L'utilisation de nanovecteurs, capables de transporter puis de libérer la substance active du médicament dans les cellules cibles, notamment dans le cas du cancer ou de pathologies inflammatoires, et de nano-objets, à même d'amplifier l'effet de la radiothérapie en préservant les tissus sains et l'amélioration du diagnostic.
Aujourd'hui, les propriétés des nanoparticules sont déjà exploitées dans toutes les spécialités médicales, de L'imagerie par résonance magnétique (IRM), qui utilise des nanoparticules d'oxyde de fer pour certaines applications à l’ophtalmologie qui délivrent des médicaments à effet retardé directement dans la rétine. Les nanoparticules représentent une alternative intéressante aux technologies de pointe déjà utilisées en médecine et concrétisent des promesses ahurissantes dignes de la science fiction.
La nanomédecine cause d’anxiété d’éthique.
Répondre aux questionnements philosophiques et éthiques soulevés par l'utilisation des nanotechnologies n’est pas une simple affaire. Manipuler et utiliser les nanomatériaux ont un impact sur le vivant et l'environnement. A mesure que ce domaine s'étoffe et que les applications se multiplient, la société civile et les chercheurs se posent la question des risques inhérents à ce nouveau domaine: les maîtrise-t-on, les contrôle-t-on suffisamment? Il s'agit d'abord de risques de sécurité et de toxicité pour les êtres vivants et l'environnement. Mais il s'agit aussi de bouleversements sociétaux : l'usage de nanomédicaments et de nanotechnologies risque-t-il de nous orienter vers l'ère de l'homme augmenté, et par conséquent de profondément transformer la notion même d'humanité, de longévité, et pourquoi pas de mortalité ?
C'est la raison pour laquelle certaines institutions publiques nationales ou internationales préconisent, outre l'évaluation de la sûreté des produits nanomédicaux, de définir une éthique et des réglementations strictes autour de ces produits, si possible à l'échelle mondiale.
Au départ, il est impératif de comprendre les concepts d’éthiques de la nanomédecine avant d’y entrée de plein pied. L’Éthique en général, est un ensemble de principes moraux à suivre et respecter dans le temps et dans l’espace. L'éthique détermine le bien, le bon en ce qui est universellement acceptable et souhaitable. Les principes de recherche éthique sont appliqués au développement de la Nanomédecine. Les 5 principes éthiques de base de recherche sont considérés dans toutes activités de recherche et développement de la nanomédecine. A savoir, diminuer les risques de blesser l’homme, obtenir un consentement informé, protéger l'anonymat et la confidentialité, éviter des pratiques trompeuses et décevantes, et pourvoir au droit de retrait. (Smith).
Les implications éthiques sont à la fois à court et à long terme et en général doivent être considérées en regard de la santé, de la société et de la morale tout court. L’un des problèmes d’avant-garde de la nanomédecine est le manque d'information disponible et à la portée du publique concernant ses aspects plutôt massifs. A court terme, la nanomédecine s’est déjà distinguée par son efficacité et sa longueur d’avance comparé à tout autre technologie. Cependant, la présence et le comportement des nanoparticules dans le corps humain ne sont pas encore bien étudiées et ainsi ses effets secondaires non souhaités peuvent être encore des mystères à découvrir.
La Nanotechnologie a le potentiel de changer ce qu’est un être humain. Dr. David B. Resnik dans ses pensées questionne la relation entre l’humanité et la nanotechnologie. Il se demande si “nous allons garder les connaissances que nous avons maintenant où allons nous profiter des opportunités que confère la nanomédecine pour envisager d’autre façon d'être de l’humain.” (Resnik).
La Nanomédecine éventuellement va devenir un outil cosmétique d'amélioration physique, potentiellement capable de renforcer certaines fonctions naturelles du corps humain. Les améliorations médicales peuvent poser des dilemmes morales en ce sens que ces améliorations mentales ou physiques peuvent créer de nouvelles inégalités jusque là inconnues de la gent humaine. De tels inégalités vont renverser les champs de compétitions rendant ainsi inférieur un humain naturel sans amélioration. Point n’est besoin de considérer que ces améliorations vont aggraver les inégalités socio-économiques.
Pour conclure, rappelons que la nanomédecine va remettre en première ligne cette question, aussi vieille que le monde: comment éviter que ce pouvoir merveilleux ne tombe entre de mauvaises mains?