En quelques petites secondes qui me paraissaient autrefois insignifiantes, tout mon quotidien se trouva bouleversé. Je suis passée d’un lit confortable à un simple drap étendu au so, dans le froid de la nuit, pour dormir.

En quelques petites secondes qui me paraissaient autrefois insignifiantes, tout mon quotidien se trouva bouleversé. Je suis passée d’un lit confortable à un simple drap étendu au so, dans le froid de la nuit, pour dormir. De ma routine habituelle à mes journées oisives, tout a changé. 12 janvier est une date à ne pas oublier, 14 aout devient catégoriquement celle à encrer dans nos mémoires. Théoriquement moins fort que le dernier, mais la sensation était nettement plus différente; les survivants du séisme du 12 janvier peuvent facilement en témoigner. 

Ma journée commença comme toutes les précédentes. Après avoir appris le renvoi de mon traditionnel cours de méthodologie appliquée du samedi matin, je suis retournée  à mon lit, me reposer. Yon sèl kou, mwen ta vle tande yon kamyon wòch kap vide (le bruit) epi vin gen yon tranbleman (la sensation).  L’ayant senti, je me suis précipitée tout droit vers les escaliers. Ce ne fut pas une tâche facile, je dois l’avouer.  En effet, en descendant, j’avais l’impression d’être projetée de tous les côtés. Je ne me souviens pas comment je suis arrivée en bas, mais tout ce que je sais, c’est que j’ai été sévèrement secouée. Mon seul objectif était de m’échapper à tout prix de la maison. Je suis arrivée à un endroit plus sécuritaire que ma chambre qui n’était autre que la cour arrière de la maison. Voyant que deux membres de ma famille manquaient, j’ai commencé à les appeler à tue-tête. J’ai appris par la suite, que mon frère était déjà à l’abri et que ma grand-mère, elle, était encore à l’intérieur. Je ne pouvais rien faire. Je me suis sentie impuissante. Cependant, les instructions reçues sur la conduite à tenir en cas de séisme depuis celui de 2010 m’empêchaient d’aller la sauver. Après quelques temps, tout s’arrêta et l’on profita de regagner la rue et sauver ma grand-mère. 

Comme si cela ne suffisait pas. Une alerte au tsunami fut lancée quelques minutes après la grande frayeur. De partout les gens se bousculaient pour essayer d’en échapper. C’était triste à voir. En même temps, c’était compréhensible. S’échapper des décombres pour ensuite mourir noyer ; c’était donc impensable. Quand on demandait aux passants qu’est-ce qui se passaient, ils répondaient : « Lanme an rale bak. Dlo pete nan tout lari. » Les répliques reprenaient de plus belles, un véritable cauchemar! Je n’ai pas pu fermer l’œil surtout après l’énième réplique qui a eu lieu vers les onze heures du soir. Le lendemain, j’ai pu observer les dégâts et je me suis sentie chanceuse tout à coup.

Les retombées seront sans doute graves et le pire c’est que rien ne changera. Les constructions se feront toujours sans le respect des normes parasismiques. Malheureusement, le manque de soins de santé, ne cesse d'accroître le nombre de personnes ainsi que le nombre de personnes souffrant en silence du Syndrome Post-Traumatique. Pour le moment présent, on survit ou du moins on essaye.

 

Elizabeth Luvia PIARD naquit en 1998 dans la ville des Cayes. Après ses études primaires à l’Ecole Nationale La Providence des Cayes, elle a intégré le College Frère Odile Joseph pour y faire ses études secondaires. En terminale, elle a été appelée à coordonner les publicatio…

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