J’aimerais tant …

J’aimerais tant que tu sois là pour regarder ce beau soleil levant apportant de la chaleur chaque matin. Les chaudes couleurs  de ses rayons raniment cette terre qui a tant souffert des cris des hommes vivants et des hommes mourants. 

Tu adorerais te baigner dans la rivière qui est devenue pure grâce à la mise en place des programmes de protection environnementale. Maintenant, les poissons reviennent y fonder leur foyer. Les bambous tout le long maintiennent la fraîcheur. Le vent est doux et léger. L’autre jour, j’y étais pour revivre pour la énième fois nos moments coquins. Les oiseaux nous accompagnaient souvent dans nos reprises de chansons d’amour. Ils m’ont tenu compagnie.

J’aimerais tant que tu voies ces champs de maïs, de blé et de pois que tu aurais voulu cultiver. On en produit des centaines de tonnes maintenant. La pluie est toujours au rendez- vous. Il tombe les  millimètres d’eau qu’il faut pour verdir les poivrons, les piments et les concombres exportés vers l’Afrique. Les agriculteurs ont réussi à convaincre les autorités de voter la loi sur le prêt agricole. De plus, l’usine de transformation des déchets organiques a éliminé l’utilisation des fertilisants chimiques qui nous ont coûté la fertilité de nos plaines. Ensuite, la découverte de la vermicompost facilitant la propreté des villes par la production de fertilisants organiques, il souffle désormais un air agréable sur nos ruelles Alyssa, ta fille, balade son petit chien sans crainte, car la sécurité a été renforcée.

J’aimerais tant que les familles monoparentales aient ce support que les soi-disants leaders leur doivent. Ainsi, l’on crierait haut et fort “L’éducation est pour tous”. Les enfants de nos chers voisins ne resteraient plus chez eux à nettoyer la maison et à mendier plus tard pour ajouter quelques pièces de monnaie à la recette de de leurs parents. Ces derniers rêvent tant à ce que leurs jeunes poursuivent une carrière qui leur apporterait une certaine stabilité financière. Et oui! C’est ce que nos parents haïtiens souhaitaient dans leur lutte quotidienne: passer  le flambeau à la  future génération. Cessons de trop mettre l’accent sur l’aspect financier, mais apprenons aussi à discuter avec nos enfants de valeurs morales. Combien d’entre eux pourraient ainsi éviter la drogue, le suicide ou la violence permanente? Pou nou, pa gen pwoblèm mantal, nou tounen bout fè, nou menm bliye sa ki rele  renmen. Nou memn bliye ke se enpòtant pou nou pale , pale nan yon bon jan konvèsasyon k’ap nouri relasyon.

J’aimerais tant revoir cet amour communautaire qui poussait les voisins à se prêter main forte à tour de rôle, alors que la récolte de l’automne remplissait les tables pour le réveillon de Noël et les maisons étaient décorées avec des guirlandes et des sapins de Noël. Selon leurs croyances,  d’autres célébraient le Macaya. J’aimerais tant revivre tout cela!

Malheureusement, tout ce qui s’offre à nous maintenant est la violence, la peur, le désarroi, la double personnalité (on joue sur les réseaux sociaux et on s’empare de la vie de l’autre en oubliant nos propres croyances), l’égoïsme, l’amour fou de l’argent (wi nou rive fè tout kalite  madigridji pou kèk fèy pyas  ou kèk adoken). 

Néanmoins, tu n’es plus là. Je me demande même si tu as vraiment existé ou si je rêve encore comme beaucoup d’entre nous. C’est d’ailleurs tout ce qui nous reste: nos rêves, nos espoirs de survivre, survivre encore une autre année…Cependant, le grand Créateur, connu comme le Grand Architecte, nous a tous créés pour connaître  la joie.