Comme cela a été défini par les premières-nations de l’île Hispaniola, Xaragua, le nom de notre magazine, votre magazine surtout, fait référence à la partie sud de l'île (faut-il encore mettre l'accent circonflexe sur le "i"?).
Comme cela a été défini par les premières-nations de l'Ile Hispaniola, Xaragua, le nom de notre magazine, votre magazine surtout, fait référence à la partie sud de l'île (faut-il encore mettre l'accent circonflexe sur le "i"?). Alors, il est donc légitime que je tienne compte de la Grand ’Anse dans cette toute première rubrique sportive, en particulier de la ville de Jérémie, appelée aussi la cité des poètes. Néanmoins, rassurez-vous, je ne vais pas vous parler de poésie, mais plutôt de football et de cette rivalité, jadis, Cayes-Jérémie.
Quand un Cayen d'une quarantaine d'années ou plus parle de l'histoire du football de la ville des Cayes, la première chose qui lui vient à la tête est sans conteste la grande rivalité qui a opposé les Cayes à Jérémie, chef-lieu du département de la Grand ‘Anse, à travers le championnat interrégional d'antan. J'imagine que c'est pareil pour un Jérémien de la même tranche d'âge.
Malgré mon statut désormais de crocodile (un jeune vieux), je ne suis pas en mesure de vous dire quand, en réalité, cette rivalité footballistique a commencé. Seuls les dinosaures en seraient capables. Ce que je sais, par contre, c'est que cette rivalité avait atteint son paroxysme vers le milieu des années 70, avec la génération des Jean-Jo Mathelier, Exanor Polo, alias Ti-Blanc, Saurel Morin, Gabner Prospère, Mahens Félix, Jérôme Colin, Alex Fantal, pour ne citer que ceux-là du côté des Cayens, de Maurice Chéry, le gardien de but de l'époque, Pierre Richard Legagneur, Éric St-Fleur et tous les autres. Ce sont ces seuls trois noms que je suis capable de vous sortir de cette formation jérémienne des années 70, car, à cette époque, j'étais un descripteur des matchs de football de la rue de chez moi, malgré mon âge de gamin et mon physique "krikèt".
Revenons à cette rivalité Cayes-Jérémie, mon sujet aujourd’hui. J'ai encore dans les mémoires les images de ces autobus robustes qui transportaient les délégations jérémiennes à chaque fois que les deux équipes devaient s'affronter en championnat interrégional. J'ai dit autobus robustes, car la route Cayes-Jérémie d'à l'époque exigeait des véhicules "djanm". Et puis, le jour du match, toute la ville des Cayes avait la peur au ventre. Peur de perdre le match et cette forme d'honneur certes, mais aussi peur carrément de cette équipe jérémienne et de sa pratique vaudou, disait-on à l'époque. Ah la croyance populaire!
Les anecdotes qui entourent les fameuses rencontres Cayes –Jérémie sont nombreuses. Certains aînés comme les Frères Alex et Berthony Fantal, Maître Rigaud Benoît, Dr Gérard Dupervil, etc auraient pu vous sortir des dizaines. Curieusement, l’une de ces nombreuses anecdotes abracadabrantes de ces excitantes confrontations entre les deux villes m’a été racontée par … Maurice Chery, le gardien jérémien à l'époque, que j’ai eu l’occasion de rencontrer à la Banque nationale de crédit, à Port-au-Prince, car il a eu une longue carrière bancaire. En effet, lors d’un match Cayes-Jérémie au Land des Gabions, la sélection cayenne bénéficia un penalty. Jean-Marie Larieux fut désigné pour l'exécution du coup de pied arrêté. Maurice Chéry alla dans sa cage, fit une sorte de simulacre juste dans le but de jouer sur la psychologie du tireur. Comme de fait, Jean-Marie Larieux rata son tire. Le portier jérémien venait de réussir son coup. Cela a donc suffit, me disait Maurice Chéry, pour qu'il soit qualifié de loup-garou par certains et de hougan de l'équipe pour d’autres.
Bref, les confrontations Cayes-Jérémie, c'était ça et plus que ça, c’est-à-dire excitation, passion, effervescences, et même violences à l’occasion. Je m'arrête là aujourd'hui. Je laisse la place aux plus anciens, qui ont tellement de choses à dire sur ce grand événement de l’époque pour les deux villes. Eux qui ont été témoins ou acteurs de ce fameux derby de la presqu'île du Sud. Disons mieux, ce qui fut, autrefois, le derby du XARAGUA.