e choix du son acoustique n’est pas un phénomène nouveau dans la musique des Caraibes. Nous avons des antécédents remarquables tels que les groupe Strings et Malavoi pour ne citer que les plus connus.
Groupe Makaya
Le choix du son acoustique n’est pas un phénomène nouveau dans la musique des Caraibes. Nous avons des antécédents remarquables tels que les groupe Strings et Malavoi pour ne citer que les plus connus. Nonobstant, il demeure une donnée rarement observée. Dans ce nouveau disque du groupe montréalais, on retrouve quelque chose de plus complexe bien que certains passages rappellent des antécédents de « strings ». Makaya absorbe diverses tendances et nous livre un son nouveau. Peut-être est-ce l’ajout du nouveau bassiste qui apporte une note plus jazzy et semble renforcer merveilleusement l’approche percussive de Bontemps (Eléments) ? Ou est-ce tout simplement que le groupe, après plusieurs années d’existence, a atteint une maturité indiscutable ? Je pense la réponse à ces deux questions se superposent pour expliquer et comprendre l’orientation et la place de Makaya sur le continuum musical haïtien.
Le groupe a fait du chemin depuis 2009, année de la sortie de leur premier album. Sept ans plus tard, on observe une meilleure cohérence, une enveloppe musicale qui s’épure de toutes fioritures pour ne conserver que l‘essentiel : un langage coloré, unique qui n’a rien à envier aux plus grandes formations musicales de la Caraïbes.
Le répertoire est varié et va du traditionnel aux classiques d’une musique qui s’inscrit bien dans la mouvance de son temps. Parlons un peu des influences du groupe. Elles sont diverses. On y retrouve une forte couleur latine, des éléments du Compas, des références à la musique populaire d’Haïti, des ébauches issues du jazz et enfin, çà et là, des phrasés originaires de la formation classique du pianiste. En effet, on discerne dans le jeu de Bontemps des couleurs de Ludovic Lamothe (Irène, Wanga Nègès), des phrasés qui flirtent avec le salsa (Gwòg Mwen) et enfin des tendances plus contemporaines, plus modernes (entendre moderne ici dans une perspective haïtienne) dans le titre éponyme Eléments qui certainement attirera l’attention du mélomane averti.
Deslouches, le chanteur, amène des couleurs variées aussi bien avec sa voix qu’avec sa guitare sèche. La combinaison rythmique du Gwo Ka et de tambours haïtiens, soutenue par un « groovy » contrebassiste ajoute une compacité et achève de donner à l’ensemble un cachet unique. Dans tout ce cocktail réussi, le groupe sous la direction de Bontemps (sept compositions sur l’album sont à son actif) s’affirme et consolide un style propre qui lui vaut une place unique sur la scène du jazz créole.
Tout compte fait, au terme de plusieurs écoutes, j’ai abouti à la conclusion que l’attente valait la peine puisque l’œuvre transpire un sens de savoir-faire et une maitrise artistique d’une forme d’expression originale. D’autant plus que Je suis conscient de toutes sortes de difficultés logistiques et financières qui peuvent s’ériger sur le parcours d’une telle réalisation. Mais tout cela fait partie du jeu et la production d’œuvre de qualité passe forcément par un temps de maturation pour l’achèvement plein et entier du produit final. Toutefois, j’espère que je n’aurai pas à attendre sept ans pour savourer le prochain opus du groupe.