Moins d’un an après le séisme qui a copieusement ravagé le Sud d’Haïti, la métropole du Sud a été encore une fois au centre de l’actualité nationale et internationale. Une manifestation populaire organisée le mardi 29 mars 2022 pour réclamer le déblocage de la Nationale # 2 paralysée depuis le mois de juin 2021 au niveau de la sortie sud de la capitale par des groupes armés du quartier de Martissant, a tourné au vinaigre. Bilan : au moins 1 mort, un petit avion stationné sur le tarmac de l’aéroport Antoine Simon des Cayes pris d’assaut par les manifestants, trainé sur la route et incendié.
Moins d’un an après le séisme qui a copieusement ravagé le Sud d’Haïti, la métropole du Sud a été encore une fois au centre de l’actualité nationale et internationale. Une manifestation populaire organisée le mardi 29 mars 2022 pour réclamer le déblocage de la Nationale # 2 paralysée depuis le mois de juin 2021 au niveau de la sortie sud de la capitale par des groupes armés du quartier de Martissant, a tourné au vinaigre. Bilan : au moins 1 mort, un petit avion stationné sur le tarmac de l’aéroport Antoine Simon des Cayes pris d’assaut par les manifestants, trainé sur la route et incendié.
Le calvaire du Grand Sud qui s’est accentué en 2016 avec le passage du cyclone Matthew. Les mois et années qui se sont suivis n’ont pas arrangé les choses, car de temps à autre, les escarmouches entre les gangs ennemis s’affrontant fréquemment au Portail Léogane, à Village de Dieu et à Martissant ont constitué une véritable épine aux pieds des usagers de la route de Martissant. Particulièrement les acteurs du secteur des transports terrestres, du commerce et surtout du tourisme ou quasiment tous les hôtels du Grand Sud ont réduit considérablement leur personnel. Ceci pour pouvoir faire face au ralentissement drastique des activités économiques causé par les attaques sporadiques des bandits armés opérant à visière levée sur la route.
Le tremblement de terre du 14 août 2021 a donné le coup fatal aux espoirs d’un renouveau dans le Sud en terrassant les dernières infrastructures sur lesquelles reposait l’économie de la région. Le bilan des dégâts dans le grand Sud était évalué à 1,6 milliard de dollars. Ce montant représente 10,9% du produit intérieur brut (PIB) de l’année fiscale 2019-2020, selon les données tirées du document intitulé « Évaluation Post-Désastre En Haïti, Séisme du 14 août 2021 dans la péninsule sud ».
Quand on connait le poids du Grand Sud dans la production agricole nationale, il y a lieu de s’inquiéter des effets à moyen et long terme de ce séisme sur le Sud en particulier et sur le pays en général. En effet, toujours selon le document produit par la Primature cité plus haut :« Près de 20% de la production annuelle de maïs et de haricots du pays ont été produits en 2019 dans la Péninsule Sud. Le département de la Grand Anse est le principal producteur d’igname du pays et le département du Sud possède des vignobles (Charbonnière). Les trois départements de la Péninsule concentrent 18% de l’ensemble du cheptel Haïtien. En ce qui concerne la pêche, la Péninsule Sud concentre le plus grand nombre de pêcheurs, avec 16,6% dans le département du Sud, 20,5% dans celui de la Grand’ Anse, et 6% dans le département des Nippes. »
A côté des dégâts causés par le séisme, il faut encore mentionner le fait que les régions touchées étaient déjà en proie à l’insécurité alimentaire touchant environ 4,5 millions d’habitants et à l’ouragan Grace qui a secoué la côte sud du pays. La majorité des victimes de ces catastrophes ont pu survivre grâce à la résilience qui caractérise les Haïtiens. Les écoles, les hôpitaux, les centres de santé et autres infrastructures publics détruits ou endommagés attendent toujours.
Sept mois après ce tremblement de terre, les démarches pour relancer l’économie et la construction des régions touchées sont restées au point mort. Mis à part le bilan dressé par les autorités et quelques promesses d’aides faites par des pays et organismes étrangers tardent à se matérialiser. Et la faute incombe surtout aux autorités haïtiennes qui, dans leur inertie inexplicable, n’encouragent pas la venue de l’aide.
Le climat d’insécurité instauré dans le pays depuis plusieurs années ne fait que se renforcer au fil des mois. Loin de s’affaiblir, les acteurs de l’insécurité s’enhardissent même à repousser dans ses derniers retranchements. L’Etat n’est pas en mesure de garantir la circulation sur nos routes. Les « madan sara » sont au bord de l’asphyxie ; les entreprises du grand Sud ne peuvent plus se ravitailler ni vendre leurs produits en dehors de leurs frontières terrestres ; la population se retrouve coincée entre l’enclume de l’immobilisme et le marteau de l’inflation engendrée par la rareté des produits causée par le blocage de la route nationale par les gangs armés.
Le Port du Sud et le projet de l’agrandissement de l’aéroport du Sud, les deux alternatives proposées comme voie de sortie et moyen de relance économique de la Péninsule du Sud sont constamment ignorées par l’Etat. Ce dernier n’agit que sur la dictée de l’International dont les intérêts contrastent avec ceux d’Haïti. Face à un tableau aussi sombre et compte tenu de la veulerie affichée par les autorités étatiques, la population, consciente de sa situation et de sa force veut prendre son destin en main.
Quasiment oublié par la majorité des gouvernements qui se sont succédé e Haïti depuis la deuxième moitié du 20e siècle, le département du Sud mange son pain noir dans l’indifférence totale de ceux chargés d’assurer un certain bien-être aux citoyens en garantissant une gestion progressiste de la cité. Les catastrophes naturelles, la corruption et la mal gouvernance se sont jointes pour placer le grand Sud D’Haïti tout en haut de la carte de la pauvreté mondiale.
Le dénuement indescriptible de cette partie du pays explique la présence persistante et simultanée en ce lieu depuis plus d’une année de la grande presse internationale venue afficher notre misère inqualifiable à la face du monde, des ONG pour apporter des solutions factices aux problèmes récurrents de la population ; des groupes de missionnaires religieux pour nous mettre sur la voie du salut ; sans oublier des explorateurs marins, qui selon les habitants de la région, sondent les profondeurs marines et terrestres à la recherche d’« On ne sait quoi ».
A ce rythme-là, vu le ras-le-bol de la population, la conjoncture risque de devenir plus explosive. Des mouvements comme celui du 29 mars sont à craindre. Car, la bête affamée à qui l’on ferme toutes sorties devient dangereuse.