Il est surprenant de voir que les livres sur la pensée positive n’expliquent pas comment arriver à changer sa façon de penser. L’homme doit s’efforcer de penser positivement. Après tout, à force d’essayer, il finira par penser positivement.
Il est surprenant de voir que les livres sur la pensée positive n’expliquent pas comment arriver à changer sa façon de penser. L’homme doit s’efforcer de penser positivement. Après tout, à force d’essayer, il finira par penser positivement. En effet, l’état final de penser positivement n’est autre qu’assumer sa responsabilité, accepter la réalité telle qu’elle est et adopter un regard sain sur soi-même. Il ne suffit donc pas d’exister, il faut pouvoir penser.
Il est malsain de se forcer à être autre chose que soi-même. Un nègre blanc, un esclave colon ou un pauvre pacha dérivent de pensées saugrenues. Malheureusement nous n’en sommes pas conscients. Ce n’est pas facile de faire autrement ou d’y arriver, diront certains.
En réalité, si nous ne fournissons aucun effort, nous n’y arriverons pas et si nous ne nous acharnons pas dans cet effort, nous ne pourrons y arriver non plus. Un dilemme haïtien, fruit de quatre cents ans d’esclavage et de la suppression de la pensée, c’est que penser est synonyme de révolte et d’opposition.
Les pensées se présentent sous diverses formes, et nous pouvons les trier dans de nombreuses catégories. La pensée peut être : positive/négative, constructive/destructive, éros/thanatos… Après tout, il n’y a vraiment que deux catégories de pensées : extériorisées et intériorisées.
La pensée est dite « extériorisée » quand elle s’appuie sur un objet extérieur à soi, par exemple penser à son travail ou à sa famille ou à son pays. Cela s’applique aussi à soi-même, quand on se demande comment on doit agir, ou ce que les autres pensent de soi. Dès que nous pensons au monde qui nous entoure, à notre pays, notre pensée s’extériorise. L’extériorisation nous permet d’aller à la découverte du monde extérieur, aussi bien qu’à celui qui mène au plaisir et à la souffrance, au bonheur tant qu’au malheur.
La pensée est dite « intériorisée » quand elle ne s’appuie pas sur un objet extérieur à soi, par exemple quand on se sent bien devant un paysage ou après avoir fait l’amour. Lorsqu’on contemple les beautés de la nature, la pensée extérieure vivifie la pensée intérieure et nous rend heureux, mais l’image que nous renvoie la pensée extérieure devant la misère et la salubrité tue la pensée intérieure et nous diminue. Quand on arrive à avoir l’esprit calme et qu’on s’accepte tel/le qu’on est, notre pensée s’intériorise, mais cela ne dure jamais longtemps. L’intériorisation nous permet d’aller à la découverte de notre monde intérieur, et mène à l’état de paix intérieure.
En regardant attentivement, nous pouvons constater que nos pensées ne sont jamais vraiment intériorisées.
On se préoccupe de sa famille, de son travail, de ses amis, de sa réussite sociale, de ses prochaines vacances, des nouvelles dans le monde, de la perception des autres, du prochain « peyi lòk », du manque de soins de santé, de l’absence de sécurité, du chômage…
Il est important de travailler sur sa pensée intérieure, même quand elle ne dure pas, car elle est la clef de la pensée du bonheur. C’est difficile à croire qu’une pensée qui n’excite pas peut créer le bonheur. Autant l’extériorisation permet de s’amuser, autant l’intériorisation n’apporte rien d’excitant. Toutefois, on se sent bien quand on pense à l’intérieur. On fait des projets qui, peut-être, ne se réaliseront jamais, on rêve, on planifie. C’est ce à quoi ne peuvent aspirer ceux qui sont dans l’esclavage quelle qu’en soit la forme et qui sont victimes de la suppression de la pensée. Ceux-là ne peuvent se préoccuper de leur bien-être. Et c’est le constat regrettable chez la plupart des Haïtiens. Ils se contentent de subsister au lieu d’exister, donc au lieu de penser.
La méditation ne suffit pas pour intérioriser sa pensée. Bien sûr, elle peut aider, mais pour qu’elle soit efficace, il faudrait méditer plusieurs heures par jour, et cela n’est pas possible dans une société où l’Haïtien ou n’importe quel individu doit travailler pour survivre.
Il y a une technique très simple qui peut être appliquée, mais requiert de la patience : dès que vous ressentez une souffrance intérieure, recentrez- vous en cherchant la source de la pensée, le « Je ». Oui, vous seul/seule êtes la source de votre pensée, donc de votre existence. Le principe est de se focaliser sur le « Je », ou plus exactement sur la source du « je », quel que soit ce à quoi cela réfère : haine, chagrin, révolte… Bien entendu, si tout va bien, on n’a pas besoin de se recentrer puisqu’on est déjà centré. La prochaine fois que vous vous sentez mal intérieurement, que ce mal soit causé par le stress de la vie, du pays ou des difficultés personnelles, au lieu d’essayer de lutter contre ce qui vous arrive, concentrez- vous sur le « je ». L’exercice est plus facile si vous fermez les yeux, mais fonctionne aussi les yeux ouverts. Cela peut bien sembler abstrait mais avec la pratique vous sentirez ce que cela signifie. Le fait de vous recentrer, aussi simple et banale qu’il paraît vous permettra de réduire votre stress et de voir la situation sous un nouvel angle. Vous pouvez recourir à cette technique à chaque instant de votre vie n’importe où, même au boulot.
Il est inutile de rechercher des pensées positives ou de rejeter les pensées négatives, puisque le travail consiste à accepter les pensées qui surgissent et à observer ce qui se passe, contrairement à la pensée positive.
Par la pratique, vous commencerez à percevoir le processus d’extériorisation de votre pensée. N’hésitez pas, extériorisez votre pensée intérieure. Vous commencerez à ressentir une profonde liberté intérieure, et aussi un sentiment de paix intérieure qui grandit en vous pour vous faire exister. Pensez pour exister.