Editorial
Publication du 15 Mai 2021
15 May 2021
Jacmel et ses traditions
Jacmel et ses traditions
Jacmel a été mis, depuis plus de deux décennies, sous les feux de la rampe comme ville créative déclarée par l’UNESCO à cause de son artisanat ; ville du carnaval à cause de ses relations avec la Nouvelle Orleans pour son architecture ; … cependant Jacmel a d’autres atours et atouts qui attirent l’attention. Ses sites touristiques à eux seuls pourraient asseoir sa notoriété par leurs décors insolites et singuliers : Bassin Bleu, Fort Ogé, Moulin Price, Cascade Pichon, Lagon des Huitres à Belle Anse ; les belles villes en puissance telles que La Vallée, les différentes fermes de production agricole à Seguin, La Montagne, Cap-Rouge, Marbial, etc. L’Ecole de Musique Desaix Baptiste, l’Ecole de Cinéma devenue Audio Institute.
Cette ville, fondée en en 1698 par le Gouverneur de la Colonie de St. Domingue, Jean-Baptiste DUCASSE, est le berceau de la création du drapeau vénézuélien par Bolivar qui y a séjourné et qui a fréquenté la Loge maçonnique de Jacmel et, ayant gagné la sympathie des jacmeliens à la cause de la liberté de l’Amérique Espagnole, un contingent de Jacmeliens au nombre de 100 sont allés se battre au côté du Libertador.
Première ville électrifiée dans la Caraïbe en 1895, et qui communiquait avec Kingston via un câble télégraphique sous-marin, elle a accueilli des voyageurs illustres : Paul Gauguin (1883) ; Jean Coquelin, Madeleine Renaud ; Le Cardinal Guisseppe Scapappietra, neveu et Légat du Pape Grégoire XVI, venu négocier le Concordat entre la République d’Haïti et le Saint Siege. Des visiteurs modernes tels que : Pierre Vasiliu, Sophie Marceau, Claude Brasseur, Francis Ford Coppola, Ben Stiller, Sean Penn, Jimmy Buffet, pour ne citer que ceux-là…
Elle a donné naissance a des enfants illustres et célèbres : Hannibal Price III, Charles Moravia, Louis Pélissier Baptiste, Alcius Charmant, Rene Depestre, Jean Metellus, Professeur Jean Claude, Jeanne Duval (l’amante de Baudelaire), Edgard Gousse, Maurice Alcibiade Lubin…. Sans compter les grands noms de la littérature, de la politique qui l’ont adoptées comme leur ville d’adoption en vertu de leurs parents qui y ont pris naissance : Alcibiade Pommayrac, Michaëlle Jean, Ginou Oriol, etc.
Cette ville qui investit dans la promotion de la culture, des traditions, de l’art et de l’artisanat a devant elle beaucoup de défis à relever pour la dynamisation de ses rêves et de son idéal, comme cité en proie aux affres de la misère commune et du désespoir incalculable qui sévissent dans toutes les communautés haïtiennes actuelles. Toutes ses traditions culinaires, ludiques, socioculturelles, morales, …même sa position comme ville qui a connu l’autonomie communale et des manières de bien faire et de bien gérer la chose publique sont aussi dans le marasme : l’électricité, l’eau potable, la gestion des déchets, l’agriculture… ne peuvent plus être mis sous le tapis et attendre la saint glinglin. Nous souhaitons que les prochaines années soient plus clémentes au destin et à l’avenir de ces villes-phares qui ont inspiré des générations fières qui voyaient en leur patelin natal, génitrice féconde, un endroit où il faisait bon vivre dans un coude-à-coude fraternel mettant en valeur les notions de la servitude volontaire, telle que prônée par Etienne de la Boétie.
Que le citoyen Jacmélien, - hommes et femmes, - prenne note pour accomplir ses devoirs de citoyen du monde, comme dans les temps antiques et qu’il puisse répéter avec le philosophe Alain : « L’on est toujours ce que l’on a d’abord été ! » sans pour cela tomber dans la désuétude, le fanatisme et un certain régionalisme malsain et obtus, en ces temps triomphants de la technologie, post-moderne, post-globalisation, en pleine période de Covid-19. Temps incertains, temps difficile mais la volonté et les opportunités attrapées au vol triomphent toujours du mal-être et, comme disait l’écrivain Louis Pélissier Baptiste, « le Jacmélien est comme le bois gaïac. Il est dur comme fer. Voilà pourquoi au 19e siècle, il lui fut donné le nom de « Dyon », ce petit arbre vert qui reste vert et vivace au cœur de toutes les saisons. Ainsi le Dyon ! Ainsi Jacmel ! » Jacmel, Sursum Corda !
Aidez Xaragua Magazine à rester indépendant
Rejoignez cette communauté qui aide les journalistes et collaborateurs de Xaragua Magazine à garder leur liberté de pensée
Impliquez-vous en faisant un don