Éditorial
Publication du 31 Octobre 2020
30 octobre 2020
Octobre : un mois mémorable pour les Haïtiens
Beaucoup d’évènements importants de l’histoire d’Haïti ont eu lieu au mois d’octobre. On ne comprendra peut-être jamais ce mystère qui lie des faits et des dates mémorables de notre histoire de peuple et le 10e mois de l’année qui constitue un des témoins privilégiés de ces moments épiques. Parmi eux, il convient de citer la mort de Dessalines, la naissance et la mort d’Henri Christophe et la journée mondiale de la langue et de la culture créoles.
Ces trois moments marquants de la vie des Haïtiens ont en commun le mois d’octobre. En effet, Jean Jacques Dessalines le Grand, le fondateur de la patrie fut assassiné le 17 octobre 1806 ; Henri Christophe, dit Henri 1er est non seulement né le 6 octobre 1767 mais il est aussi mort le 8 octobre 1820 ; et depuis l’année 1983, le 28 octobre est devenu la journée mondiale de célébration de la langue et de la culture créoles.
Personne ne saurait nier le rôle indispensable de ces trois éléments dans le processus d’affirmation d’Haïti comme Première République noire de tous les temps. Même quand aujourd’hui nous ne faisons pas honneur à nos aïeux et à notre culture en rejetant les valeurs que symbolisaient l’Empereur d’Haïti et le roi du Nord en refusant au créole la place qu’il mérite dans notre existence de peuple.
« Et les Noirs dont les pères sont en Afrique, n’auront-ils rien » ? Cette interrogation de l’Empereur témoigne à elle seule les idéaux d’égalité et de fraternité que prônait Jean-Jacques Dessalines. Ses idées de justice et de partage équitable des bénéfices de la guerre de l’Indépendance lui ont valu la mort. Il a consacré sa vie toute entière à la lutte pour libérer Haïti de l’esclavage et créer une nation digne et fière. Et en guise de remerciement nous l’avons trahi, mutilé et abandonné dans les rues comme un vulgaire criminel.
C’est l'acte le plus ignoble, avilissant dont nous ayons entaché à jamais notre histoire. Au lieu de travailler a hisser cet homme au sommet de la hiérarchie des plus grands défenseurs de la liberté, de l’égalité et de la fraternité entre les hommes et les femmes de toute la planète, nous nous sommes plutôt engagés dans le sacrilège le plus honteux des temps modernes. 216 ans plus tard, nous n’avons quasiment rien fait pour élever l’Empereur à la dimension du libérateur multidimensionnel qu’il est.
En ces temps de grande déprime, Dessalines devrait être la source d’inspiration dont les jeunes Haïtiens ont besoin pour retrouver leur dignité perdue, s’impliquer à fond dans la lutte pour le recouvrement de leurs droits et se libérer définitivement de l’esclavage des temps modernes imposé par les nouveaux maitres du monde.
S’agissant d’Henri Christophe, l’Haïtien d’aujourd’hui a mille raisons d’être fier de descendre de sa lignée. Car, en termes de leadership, de gestion et de génie créateur, il n’a rien à envier aux autres grands du monde. Homme instruit, prestigieux, aux manières raffinées, Henry Christophe est reconnu par la postérité comme étant un Roi bâtisseur. En témoignent ces nombreuses réalisations dans le Grand Nord d’Haïti dont il avait fait un Etat économiquement prospère.
En effet, la construction de la Citadelle Laferrière et le Palais Sans-Souci portent son empreinte. Aujourd'hui encore, Haïti lui doit sa présence sur la carte touristique mondiale. Car l’ensemble constitué par la Citadelle Henry, le Palais Sans-souci et le site des Ramiers, forme le Parc National Historique. Situé sur les communes de Milot, de la Grande Rivière du Nord, de Dondon et Saint Raphael, ce parc a été déclaré Patrimoine Mondial en 1982 par l’UNESCO.
Loin de le considérer à sa juste valeur, certains continuent à voir en lui un dictateur sanguinaire. Le 8 octobre 2020 a ramené le 200e anniversaire de la mort de l’illustre Roi du Nord. Certaines manifestations ont été réalisées pour marquer cette date mais pas à la dimension qu’on reconnait à ce forgeur de destinée qui, de son temps, a élevé le Grand Nord à la hauteur de certains pays de l’Europe du point de vue social. Dans n’importe quel autre pays du globe ayant Henri comme aïeul, les éclats d’un évènement comme les 200 ans de sa mort traverseraient les frontières pour arriver jusqu’aux étoiles des 4 coins de l'univers. Dommage que soyons trop avares de témoignages de reconnaissance envers nos héros.
Le mois d’octobre, est aussi celui où nous honorons notre chère belle langue qui est le créole. La langue qui devrait être celle de tous les haïtiens et les unir. La langue qui a subi toute l'injustice d’une minorité complexée, une minorité aveugle face à sa splendeur, insensible à son charme et ignorant cette facilité d'apprentissage qu'elle offre. Qu’avons-nous fait pour réhausser la beauté et mettre en exergue la saveur de notre succulent créole ? Nous le rejetons et méprisons comme tout ce qui aurait pu faire notre valeur aux yeux de l’étranger.
Elle est appelée : la langue des esclaves par certains, la langue de la misère par d’autres ou encore la langue des misérables ou des « pitit Sò Yèt ». Enfin... Quand viendra le jour ou nous saurons choyer ces êtres magnanimes qui font la gloire de notre patrimoine humain? Quand accepterons-nous ce qui fait le charme de notre culture, de notre histoire? Quand allons-nous cesser de nous tirer dans les pattes pour ensuite appeler au secours le premier voisin ? La langue maternelle d’un peuple et sa culture sont ses premiers outils de développement. La science le reconnait. Aussi longtemps que nous l’ignorerons, nous serons toujours les derniers de la classe, vilipendés, à la traîne des autres nations dont nous sommes la risée.
Vive Haiti, vive sa langue et sa culture, vive ses héros !
Xaragua Magazine encore une fois, plaide pour une Haïti différente, fière et digne. La grandeur de notre pays dépend de la valeur que nous lui accordons, nous d'abord. Haïtiens du terroir et de la diaspora l’heure a sonné, elle sonne plus fort que jamais pour qu’enfin nous poursuivions la réalisation des rêves de nos aïeux. Il est plus que temps de satisfaire les voeux de grandeur de Jean Jacques Dessalines et de Henri Christophe afin de rétablir Haïti dans sa vraie place: la Première République Noire et Indépendante du monde.
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