Dans l’histoire contemporaine d’Haïti et les relations internationales, en particulier sur le plan insulaire,  un nouveau symbole vient s'inscrire, à la fois dans la dynamique populaire, dans le réveil national et dans la solidarité patriotique. La dignité est devenue le maître mot de ce nouveau monument phare, qui vise à affirmer la volonté inébranlable de promouvoir les droits de tout un peuple, déterminé à défendre son avenir et son autonomie à tout prix. 

Dans ce nouveau chapitre qui débute une nouvelle ère dans les relations entre ces deux peuples frères qui partagent l'Île d'Haïti, il faudra une fois pour toute rebattre les cartes , pour mieux concilier les intérêts au profit des deux nations.  La République d’Haïti à travers la construction du canal de la rivière Massacre tente une fois pour toute d’inaugurer une nouvelle approche responsable, respectable et réciproque dans ses relations avec la République dominicaine, à travers l'exploitation des ressources communes, représentant nos biens communs.  

Désormais, le canal de la dignité prend ainsi sa source dans la rivière du Massacre. Un haut lieu historique très sombre qui porte les tâches de sang des pays et familles haïtiennes massacrés par les dominicains en 1937. A défaut de laver le sang de ces victimes, ce canal vient certainement réparer la mémoire des milliers de familles orphelines, tout en canalisant une nouvelle forme d'énergie intelligente et de résistance collective  face à une domination raciste, rétrograde et déshumanisante.

Des artistes issus de toutes les couches de la société haïtienne, et de nombreux membres de la société civile, incluant  des acteurs influents de de la diaspora opinent, s’alignent et se solidarisent avec cette démarche inspirante et constructive. Ces poètes, dessinateurs, artistes peintres, musiciens et d’autres talents célèbres ou moins connus ne se contentent pas de prendre position à distance. Ils se rendent sur les lieux. Ces hommes et ces femmes de conviction, s’affichent ouvertement sur les lignes de la construction pour mieux témoigner de leur sentiment d'appartenance. 

D'une simple construction, la première étant destinée à l’irrigation des terres cultivables de nos courageux paysans haïtiens, nettement inférieure aux infrastructures dont dispose le voisin, on assiste à une forme de déclaration de guerre symbolique, des représailles humanitaires et un manque de respect total envers une nation sœur. La République d'Haïti mérite mieux que de tels affronts de la part de son plus proche voisin !  

Destination du canal de la dignité, en attendant la coupure des rubans pour son  inauguration officielle, ce sujet va continuer à faire couler beaucoup d’encre autant sur les médias sociaux, dans les cuisines de certains médias traditionnels, même influencés par la publicité des produits importés. Le canal avait été jusqu'à provoquer  des remous jusqu’aux tribunes des Nations-Unis et d’autres organisations régionales. Autant se demander, jusqu'où va ce canal va finir pour nous conduire ? Certainement dans la direction qui mènera vers le réveil national et l'intelligence collective !  

Derrière les sanctions et les restrictions imposées par le voisin en représailles à la volonté populaire et solidaire  des paysans haïtiens d’exploiter à leur tour cette ressource naturelle essentielle pour la production locale, en dehors des autres abus persistants, et les actes arbitraires des plus racistes imposés aux ressortissants haïtiens dans leur âme, leur chair et leur esprits, cela ne fait que justifier l’obligation pour chaque Haïtien, pour chaque dirigeant et l’ensemble des familles haïtiennes, de construire de nouvelles passerelles autour du canal, capable de rapprocher et de réconcilier les enfants de cette terre, pour une meilleure utilisation responsable, équitable et durable  des ressources, notre patrimoine. 

Dans un an, dans dix ans, dans vingt ans, et pourquoi pas dans trente ans, en 2054, lorsque la prochaine génération devra s’inscrire dans une nouvelle programmation destinée à commémorer le 250ème anniversaire de l'indépendance d’Haïti, qui représente l'âge zéro dans la promotion des droits et de la dignité de tous les peuples dans le monde, sans aucune distinction, jusqu'à traduire le nouvel ordre mondial de 1804, pour la promotion des droits humains, il faudra certainement faire un tour, autour du prochain monument qui devrait entourer ce nouveau canal de la dignité. Vecteur d'une nouvelle forme de mobilisation pour le bien-être collectif à travers les ressources naturelles, notre bien commun. Vers le canal de la rivière du Massacre,  le nouveau point de départ pour le réveil collectif, la responsabilité citoyenne,  et le rapprochement  solidaire des fils et filles de cette terre dans la dignité.

Dominique Domerçant

Xaragua Magazine

Oct 2023