Éditorial
Publication du mois de Mars 2024
31 mars 2024
Qui l’aurait imaginé voir croire que 35 ans après 1986 Haïti serait encore sur la ligne de départ. Une ligne de départ, qui nous rappelle un jeu de Monopoly, un éternel recommencement à chaque obstacle. Les crises en Haïti se succèdent et jusqu’à date, nous tardons à trouver la bonne formule pour nous sortir de l’ornière du sous-développement, ceci dû à l’égocentrisme de nos acteurs politiciens qui n’arrivent pas à faire taire leur orgueil et surtout mettre de côté leurs intérêts mesquins pour faire valoir le bien-être de la communauté. Victimes des irrégularités et de l’inégalité d’un système corrompu et injuste, nos jeunes préfèrent s’enfuir de cette terre bénie que nous a léguée nos ancêtres au prix de leur sang. Le pays est livré constamment à lui-même, nos soi-disant dirigeants refusent de se hisser à la hauteur des attentes de toute une nation, fatiguée des turbulences à répétions et frustrée du laxisme qu’ils affichent. Jour après jour, les Haïtiens font face à l’inconcevable. Nous constatons un pays jadis appelé la perle des Antilles qui offrait son hospitalité à tous ceux en quête de liberté devenir aux yeux du monde un état paria, de non-droit, vilipendé pour des raisons encore inavouées.
Qu’a fait Haïti pour mériter cela ? La population est quotidiennement aux prises avec des gangs qui régnant en maitres et seigneurs, sèment la terreur. Le panorama devient de plus en sombre et jamais notre pays n’avait plongé dans de tels abîmes. Allant du kidnapping de nos concitoyens, à la séquestration, le massacre, les vols à répétitions, les viols, le trafic d’organes, de drogue et d’armes, plus rien ne nous étonne maintenant. Haïti est devenue la risée du monde. Presqu’un mois après le DDN infligé à son premier ministre, par les groupes armés qui se font passer pour des révolutionnaires et mettent le pays à feu et à sang, la patrie tarde encore à renaitre de ces cendres. La transition devient une spirale infernale qui n’en finit point.
Transition s’il y en a, nous attendons encore la mise en place des nouveaux dirigeants qui devront malgré vents et marées affronter cette réalité. La lutte pour le pouvoir se fait une fois de plus sentir. Malgré les défis et comme de coutume, nous constatons une bataille acharnée des Lavalasiens, des PHTkistes, des Pitit Dessalines, de Ede et même du secteur privé pour le contrôle du pays. Tous veulent diriger ce Conseil Présidentiel proposé par EDE et accepté par la CARICOM. Démarche qui n’aurait aucune légitimité constitutionnelle. Décrié déjà par toute une population qui réclame sans réponse, l’application de l’article 149 de la Constitution de 1989 qui stipule :
"En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit, le Président de la Cour de Cassation de la République ou, à son défaut, le Vice-Président de cette Cour ou à défaut de celui-ci, le juge le plus ancien et ainsi de suite par ordre d'ancienneté, est investi provisoirement de la fonction de Président de la République par l'Assemblée Nationale dûment convoquée par le Premier Ministre"
Pourquoi nos dirigeants veulent persister dans l’erreur en voulant et en signant des engagements contraires aux lois de la constitution du pays ? Pourquoi vouloir accepter de monter une structure en dehors de la loi-mère en proposant un conseil de 7 membres, avec tous les frais qui en découlent ? Pourquoi dès le départ, ils ont accepté les conditions de l’étranger, au détriment de la nation, en signant la venue d’une force étrangère au pays ? Haïti a-t-il un problème d’organisation d’élections ou d’une prise en charge rationnelle de ses ressources tant humaines que matérielles pour refonder une société juste et équitable ? La transition pour une énième fois, ne devait-elle pas remettre en cause les questions qui dérangent et qui remettent à chaque mandat le pays dans un même tourment. Cessons de perdre du temps. Allons à la source de nos problèmes pour leur apporter des solutions réelles, efficaces et durables.
Haïti peine à se relever. Pourquoi, parmi les propositions, la mise en place d’une commission de vérité et de justice, d’une commission de consensus national de paix, de stabilité et de progrès est-elle omise ? La vérité un jour éclatera. Et si vraiment Haïti était la priorité, aucune stabilité ne serait possible sans un changement de régime. L’inégalité sociale est trop criante. Certains restent dans leur confort et refusent de réaliser que le problème est sérieux et que nous vivons constamment avec une épée de Damoclès suspendue sur nos têtes. La situation se complique davantage chaque jour et aucune solution de sortie de crise n’est proposée. Le peuple plonge dans un découragement fatal en attendant naïvement un messie qui viendrait d’ailleurs. L’international joue au cache-cache « li ben » avec nous. Ces prétendus amis d’Haïti, sont-ils vraiment des amis ? Une chose est certaine, comme le phœnix, Haïti renaîtra encore de ces cendres et il y aura encore et encore des Haïtiens qui croiront et lutteront sans cesse en partageant leurs idées, leurs opinons et voudront défendre ce petit coin de paradis qui nous a tant donné. Haïti ne périra pas. Qu’on le veuille ou non. Haïti vivra pour redevenir la perle admirée par tous.
Ayiti pap Peri
Ayibobo.
Jude Jacques Renaud Duvivier
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