Éditorial
Publication 31 Octobre 2016
31 octobre 2016
Chers lecteurs,
Nous sommes fiers de vous avoir fait profiter de la version écrite de Xaragua Magazine et heureux de l’accueil sans équivoque que vous avez réservé à cette initiative. Ces premiers mots qu’on vous adresse auraient dû être bien différents ; nous avions depuis plus d’un mois choisi un ensemble de textes qui devaient, une fois de plus, égayer vos jours. Nous étions prêts à vous conter le département du sud dans toute sa splendeur. Mais les aléas de la nature en auront voulu autrement. Les coups de l’ouragan Mathieu ont bouleversé, renversé, martyrisé, méprisé ce que nous avions de plus précieux ; une région verdoyante avec des paysages hors du commun. À l’heure où vous lisez ces lignes, il ne reste plus beaucoup d’arbres qui tiennent debout, pas grand nombre de toitures fièrement érigés sur nos têtes. Et pourtant, à Xaragua Magazine, nous avions vite compris que le Sud ne s’était pas avoué vaincu ; les jeunes se mobilisent, les amis et les frères arrivent des quatre coins de la planète pour nous aider à nous remettre debout. Partout on crie que le sud se plie mais ne se casse jamais.
C’est la raison pour laquelle Xaragua Magazine refuse de se laisser guider par les mauvais présages. Après des heures de concertation, nous avions décidé de ne modifier ou changer aucun texte que nous avions choisi avant la catastrophe. Car s’il est encore temps de pleurer nos pertes, nous savons qu’il est aussi temps de célébrer le Sud, ce qu’il était dans le passé et ce que lui réserve l’avenir. Dans ces moments de détresse, nous avons souvent tendance à oublier qu’une ville n’existe pas seulement dans l’espace mais aussi dans le temps. Ne pas l’admettre serait sous-entendre que nos espaces communs sont enfermés dans un certain immobilisme ; or, nos villes et nos campagnes bougent et se métamorphosent sous nos yeux. Nous n’avons pas connu la Place d’Armes des Cayes de nos grands-parents et nos enfants ne connaîtront pas la nôtre. Mais nous étions heureux d’y aller comme nos grands-pères avant nous et comme nos fils le seront à leur tour. Car même les plus mauvais moments offrent des opportunités de reconstruire et de redéfinir l’avenir sur d’autres bases.
Et un nuage de plus est venu couvrir nos cieux, l’une de nos collaboratrices, Madame Edmonde Piard, nous a laissé pour l’au-delà quelques heures avant le passage de l’ouragan. À Xaragua Magazine, on se raconte qu’elle avait refusé de voir cette ville qu’elle a tant chantée se taire sous les assauts du vent. Xaragua magazine célébrera sa vie car Edmonde continuera d’exister à travers nos pages.
Nous espérons, chers lecteurs, que vous nous lirez encore une fois de plus avec appétit et espoir car un lieu dont on parle et qui se lit, est un lieu qui vit plus que jamais. Que vive le grand sud, que vive Haïti.
D.Alain Menelas
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